Vous avez parlé de la gouvernance de France 2030, mais vous n'avez pas évoqué le Commissariat général au plan.
Or la réindustrialisation doit être articulée avec la mutation de l'existant, où l'on n'enregistre pas toujours des sauts technologiques considérables et où les évolutions nécessaires sont lentes. Il existe d'autres secteurs où il nous faut regagner de la souveraineté, et cela ne peut être que dans la très haute technologie. Cela s'impose aussi dans toute une série de secteurs classiques.
Ce saut technologique, par l'innovation, est par ailleurs nécessaire. Or la France connaît une grande dispersion des acteurs, et ce manque de visibilité entretient un doute profond sur la capacité de notre pays à se réindustrialiser. Je le déplore personnellement, car c'est de nature à décourager l'investissement d'un certain nombre de jeunes dans ces domaines essentiels.
Il n'existe pas de ministère de l'industrie, puisque le ministre de l'industrie est sous la dépendance de Bercy. Historiquement, l'industrie ne se résume pas à une vision financière, même si celle-ci est évidemment essentielle. Pensez-vous qu'il faille rester sur cette sorte de dispersion générale, ou est-il nécessaire de prévoir un meilleur regroupement et une plus grande lisibilité ?
Le second sujet que je souhaite aborder est celui de l'ampleur du plan, comparée à ce qui se passe dans d'autres pays. Il me semble qu'il existe des besoins financiers supplémentaires, peut-être sous forme de fonds souverains, en matière de capitalisation.
Les prises de risques sont indispensables dans certains domaines, au moins en termes de portage de capital de moyenne durée. À défaut de longue durée, certaines sociétés vont voir ailleurs faute de capital. Or la BEI accompagne les banques mais ne veut pas, pour l'instant, assumer cette mission.
Vous nous avez dit qu'un tiers seulement des projets est retenu. Pourquoi les deux tiers restants passent-ils à côté ? S'ils sont d'une priorité moindre par rapport à vos critères, il est cependant normal d'essayer de les aider. Un travail avec les régions ou d'autres mobilisations financières ne permettraient-ils pas d'éviter une trop grande démoralisation ?
Enfin, on rencontre un immense problème d'investissement dans le domaine de la recherche. Quoi qu'on en dise, malgré les PIA, nous n'avons pas développé la recherche publique, et nous sommes très en retard par rapport à nos concurrents, notamment l'Allemagne. J'ai l'impression qu'on nous annonce de très grosses sommes mais que, finalement, l'investissement n'est pas à la hauteur de l'enjeu, considérable.