Intervention de Mayeul Tallon

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 14 décembre 2022 à 8h30
Risques liés au phénomène de retrait-gonflement des argiles rga — Audition

Mayeul Tallon, chef du bureau des marchés et produits d'assurance à la direction générale du Trésor (DGT) :

Vous mentionnez le cas des retraités qui voient leur maison perdre toute leur valeur, mais je pense aussi aux jeunes ménages qui empruntent et dont la maison devient invendable, leur situation est critique elle aussi.

Quel est le cadre juridique le plus pertinent pour le RGA ? Pour nous, c'est le régime des catastrophes naturelles.

Faut-il un régime nouveau ? La réponse est complexe, car le régime actuel ne pourra pas traiter l'ensemble des problèmes ; c'est pourquoi nous voulons le faire évoluer. Le régime des catastrophes naturelles est un trésor national, ce mode d'indemnisation exceptionnelle très robuste est pris en exemple à l'étranger parce qu'il indemnise ce risque grâce à une surprime appliquée très largement et qu'il est lui-même garanti par la réassurance publique, donc une garantie illimitée de l'État.

Il faut conserver cette solidarité entre les territoires, entre villes et campagnes, entre métropole et outre-mer, ou bien nous perdrions la capacité d'indemniser les dommages subis lors d'inondations, ou par exemple lors des ouragans dans les Antilles...

L'application du critère de l'exceptionnelle gravité nous paraît poser plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait. Il y a d'abord un problème d'échelle, puisque le risque porte sur la moitié des maisons individuelles - 10 millions sur 19,5 millions d'habitations individuelles. Ensuite, son application solliciterait encore davantage le régime des catastrophes naturelles qui l'est déjà beaucoup, puisqu'il consacrait l'an passé 1 milliard d'euros aux dommages liés à la sécheresse, deux fois plus qu'il y a dix ans, et les quatre cinquièmes des coûts sur un cinquième des sinistres : avec le critère de l'exceptionnelle gravité, le régime des catastrophes naturelles deviendrait insoutenable. Enfin, l'État perdrait son thermostat pour réguler le système, qui serait aux seules mains des experts en charge d'apprécier la gravité ; ce serait alors un système incomplet.

Pour la direction générale du Trésor, le mieux est donc aujourd'hui d'adapter les critères du régime des catastrophes naturelles. Nous pensons à élargir les critères pour mieux reconnaître les facteurs géologiques et météorologiques, ce qui permettra de lever les effets des découpages administratifs, qui font qu'aujourd'hui des sinistres sur des bâtiments proches sont indemnisés et d'autres pas, du seul fait que les biens ne sont pas sur la même commune.

Nous pensons également à exclure les bâtiments construits depuis la loi « Elan », parce qu'ils sont censés avoir des fondations suffisantes pour prévenir les conséquences du RGA.

Nous pensons aussi à regarder les catégories d'indemnisation, entre les éléments esthétiques et les éléments structurels.

Notre objectif est de conserver la soutenabilité du régime des catastrophes naturelles, car dans le cas inverse, nous perdrions notre capacité d'indemniser toutes les catastrophes naturelles.

Quel peut-être le rôle du fonds « Barnier » ? Je ne suis pas le mieux placé pour répondre. L'intervention du budget général de l'État est décisive, mais elle résulte de choix politiques et la question se pose de l'expertise et des seuils d'intervention : il y aura nécessairement un travail pour définir l'éligibilité et le contrôle ; le sujet est complexe.

Pour ce qui est de relever les primes d'assurance alimentant le financement du régime des catastrophes naturelles, le Gouvernement a répété sa volonté de ne pas accroître la pression fiscale, cela est encore plus vrai en période d'inflation.

Cependant, il faut conserver la solvabilité du régime, et il est probable qu'à l'horizon de cinq ans, un ajustement sera nécessaire - avec les critères actuels et si l'on ne change rien, le surcoût serait de 500 millions par an, avec un stock de 2,5 milliards d'euros. Cela n'est guère tenable.

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