D’ailleurs, ce projet de loi de finances ne protège pas plus les collectivités que nos concitoyens contre la hausse de l’inflation.
La majorité – relative – du Président de la République avait l’occasion de tenir compte du scrutin législatif du mois de juin dernier, elle l’a manquée ! À l’Assemblée nationale, la succession des recours au 49.3 par le Gouvernement a conduit à défaire les résultats des votes intervenus afin d’établir un texte qui intègre 99 % des propositions de votre seule majorité !
Au Sénat, ensuite, vous avez fait le choix de ne pas retenir nos propositions ou si peu… Tout naturellement, l’échec de la commission mixte paritaire en témoigne – il était écrit d’avance, reconnaissons-le.
Nous avons donc désormais une version finalisée du texte – nous attendons l’analyse vigilante du Conseil constitutionnel –, sur laquelle nous pouvons nous prononcer. Disons-le d’emblée : le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera contre.
S’agissant des recettes, notre groupe a tenté – en vain, il faut bien l’admettre – de rééquilibrer ce budget et, plus particulièrement, de proposer une fiscalité plus juste, plus équitable et plus adaptée aux activités économiques et sociales actuelles. Nos propositions de bon sens en matière de justice sociale ont tout simplement été balayées, tant par la majorité sénatoriale que par le Gouvernement.
Mes chers collègues qui siégez sur les travées de droite, pour le dire sans ambages, alors que l’urgence sociale est indéniable, en matière de recettes, vous partagez avec le Gouvernement exactement la même vision et défendez les mêmes propositions libérales.
Pourtant, si, face à l’inflation galopante, la fraternité devrait être le maître-mot de l’action publique, vous tous avez fait le choix de vous obstiner en poursuivant sur la voie du libéralisme : rejet du rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et de l’instauration de la taxation sur les superprofits, réticence à verdir la fiscalité… Où est passée la recherche du consensus et du compromis avec l’ensemble des forces républicaines ?
Il en est de même pour les dépenses. En dépit de la mise en échec systématique de nos dispositions en matière de recettes, qui vous aurait donné des marges budgétaires supplémentaires, nous avons tenu à vous faire de nouvelles propositions. Malheureusement, force est de constater que le maintien des services publics dans les territoires, notamment ruraux, n’était pas votre priorité : hôpitaux, écoles, bureaux de poste… rien de tout cela n’était au cœur de ce budget, nous le déplorons !
Votre indifférence à l’égard du terrain s’illustre aussi par le sort réservé aux collectivités territoriales : toutes alertent sur leurs difficultés de financement – elles subissent les mêmes crises que nous… Pourtant, monsieur le ministre, vous avez fait fi de l’adoption par le Sénat de la proposition socialiste d’indexer la dotation globale de fonctionnement sur l’inflation. Je ne peux pas non plus passer sous silence votre entêtement à vouloir supprimer la CVAE, pourtant sauvée, si je puis dire, par le Sénat grâce à une proposition venue de la gauche !
Finalement, vous aurez réussi l’exploit de présenter une copie qui ne satisfera aucun élu local ni aucune association représentative de ces derniers. Soulignons-le !
Dans un contexte marqué par une inflation importante, la sortie de la crise sanitaire, la guerre aux portes de l’Europe, notre pays a, je pense, besoin d’un État fort. Au contraire, votre politique est fondée sur deux principes clairs : le désarmement fiscal en matière de recettes et la contraction des interventions de l’État en matière de dépenses.
Monsieur le ministre, somme toute, si votre gouvernement prétend incarner une forme de modernité en renouvelant les modes d’exercice du pouvoir, la réalité est tout autre ! Vous défendez une politique libérale – je partage le constat dressé par Éric Bocquet –, pour ne pas dire ultralibérale ; c’est aux antipodes des besoins de notre pays et de notre population !
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons que nous opposer à ce projet de loi de finances pour 2023.