Pourquoi la Cour ne formule-t-elle pas de recommandations explicites sur la gestion des stocks stratégiques, sur la gouvernance de SPF, sur son organisation territoriale, sur son niveau de dotation ? Nous avons établi des constats détaillés, mais pour aller plus loin, il faut mettre en balance l'intérêt de santé publique et la dépense publique qui en résulte, il y a des arbitrages budgétaires, qu'il s'agisse du niveau des stocks ou de la dotation à SPF : ces décisions sont entre les mains de l'État, garant de ce que le niveau des stocks corresponde aux besoins identifiés. Il sera intéressant, à cet égard, de suivre la mission confiée à Cécile Courrèges sur la création d'une Direction de préparation et de gestion des crises.
Sur la gouvernance, la Cour considère que la composition du conseil d'administration de SPF n'appelle pas de modification, mais nous regrettons le positionnement en retrait de ce conseil sur la stratégie.
Sur la territorialisation, nous constatons que les avis des directeurs généraux d'ARS sont partagés sur le rattachement des cellules départementales de SPF aux ARS. Le directeur général de l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes y est certes favorable, mais ses homologues des Pays de la Loire et des Hauts-de-France sont bien plus nuancés. Ce qui compte, c'est que ces cellules régionales soient présentes sur le terrain et en lien avec l'échelon central de SPF- et si c'est bien le cas, comme aujourd'hui, il ne nous paraît pas utile de changer l'organisation sur ce point.
La Cour vous rejoint pour dire que la crise sanitaire a confirmé les craintes que l'on pouvait avoir sur la réserve sanitaire - le cadre d'emploi, les rémunérations, l'organisation, tout de la réserve sanitaire est à revoir entièrement. La Cour recommande aux pouvoirs publics une remise à plat de cet outil utile face à la crise, mais qui a montré toutes ses limites dans son organisation actuelle.
Le recours de SPF à des prestataires extérieurs pour la gestion des stocks a représenté 7 millions d'euros, le marché le plus important concerne les prestations d'appui opérationnel, pour 3,4 millions d'euros. Ce recours n'était pas au coeur de notre mission. Le Sénat a publié un rapport sur la question, et la Cour des comptes va se pencher prochainement sur le sujet.
Le pilotage stratégique de SPF est formellement aux mains de son conseil d'administration, mais c'est le ministère de la santé qui porte le pilotage de l'agence. Il faut donc une bonne coordination entre les instances de SPF et le ministère. Sur la gouvernance de la politique de santé, le comité d'animation du système d'agences contribue peu, je l'ai dit, à l'élaboration de la politique nationale de santé et aux priorités de la prévention et de la promotion de la santé, mais la Cour n'a pas identifié de problématique particulière de périmètre de compétences entre les agences.
La création de SPF a été inspirée par les agences qui existent en Grande-Bretagne, aux États-Unis et au Canada, mais il est difficile d'aller loin dans la comparaison tant les compétences sont différentes et parce que nous n'avons pas accès à la comptabilité analytique de ces agences. Cependant, nous constatons que les activités de recherche sont intégrées aux agences en Allemagne et aux États-Unis, et nous pensons que SPF doit conserver des liens forts avec la recherche.
La déontologie n'a effectivement pas fait l'objet d'investigation, elle a été examinée dans un rapport de 2016, nous y reviendrons probablement bientôt.
La Cour ne voit pas d'incohérence ni de difficulté particulière au fait que l'assurance maladie soit le financeur unique de l'agence. Nous n'avons pas non plus proposé que la gouvernance de l'agence en soit modifiée, ce schéma fonctionne dans d'autres cas, par exemple pour l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Il n'y pas de problème à découpler le financeur et le décideur. C'est ce qui se passe par exemple aussi avec les hôpitaux, qui sont financés par l'assurance maladie mais qui relèvent de la politique hospitalière définie par l'État.