Certains d'entre vous ont affirmé que ce texte présentait de bonnes propositions, mais qu'elles ne résoudraient pas le problème de la pénurie. Mais il faut essayer ! Nous souhaitons faire des propositions concrètes pour améliorer la prise en charge et l'accès aux soins. Une proposition de loi ne vise pas à embrasser tous les sujets, mais à apporter des pierres à l'édifice. Nous en apportons cinq, ce qui est peu, mais représente déjà un progrès.
Les mesures portées par le texte tendent d'abord à une meilleure répartition sur le territoire et il faut pour cela agir sur la formation, comme sur l'installation des médecins. Ensuite, nous souhaitons assurer une meilleure permanence des soins qui doit être mieux partagée : aujourd'hui seuls 38 % des médecins assurent cette permanence. Enfin, nous aspirons à une meilleure coordination des professionnels entre eux, y compris les paramédicaux, sous la responsabilité du médecin traitant, qui doit rester le pivot de cet exercice coordonné.
Le texte concerne principalement la médecine générale parce qu'il a fallu restreindre le champ. Pour autant, un meilleur accès aux soins et une meilleure prise en charge permettront aussi de désengorger les hôpitaux et de soulager les médecins hospitaliers.
J'ai également entendu que la médecine générale n'attirait plus quand en fait, toutes les places proposées en troisième cycle dans cette spécialité sont prises. En revanche, nous constatons un problème d'accès à ces formations qui attirent quasiment exclusivement des étudiants des catégories socioprofessionnelles très privilégiées issus des métropoles, qui n'ont pas la connaissance des territoires ruraux. Certains territoires se sont déjà engagés pour diversifier cet accès.
J'en viens à l'épuisement professionnel, qui ne permet pas d'assurer la permanence des soins et que l'on retrouve chez les internes. L'exercice coordonné doit permettre d'améliorer l'organisation de la prise en charge et l'année de professionnalisation proposée dans les zones sous-denses permettra aux étudiants de mieux se préparer à l'installation.
En ce qui concerne le conventionnement sélectif, à ce stade et compte tenu du fait que plus de 70 % de la population habite dans des zones sous-denses, il ne s'agira pas d'une mesure très contraignante. Pour autant, elle donne une impulsion pour que les jeunes généralistes puissent s'installer dans ces zones où nous manquons de médecins.
Mme Poncet Monge l'a souligné : la situation n'est pas la même partout. C'est pourquoi nous proposons que l'accueil et la prise en charge des étudiants en année de professionnalisation s'organisent au niveau du département. Il s'agira notamment d'apporter des réponses en termes de logement, d'emploi pour le conjoint ou de prise en charge des enfants dans les crèches. Je vous encourage à étudier l'exemple du dispositif « Présence médicale 64 ». Cette approche globale et coordonnée fonctionne, surtout dans les zones sous-denses.
L'un d'entre vous a évoqué le manque d'efficacité supposé des mesures de régulation des installations dont fait partie le conventionnement sélectif. Cependant, ce dispositif a été expérimenté ailleurs, notamment en Allemagne et au Québec. Nous avons entendu Mme Dominique Polton, qui a étudié ces expériences et si, dans les zones les plus reculées du Canada, il reste difficile de faire venir des médecins, la situation s'est très nettement améliorée dans les pays l'ayant essayé.
De plus, l'objectif du conventionnement sélectif n'est pas de répondre à la pénurie, mais de permettre de ne pas aggraver la situation et d'inciter à une bonne répartition, notamment lorsque la démographie redeviendra plus dynamique en raison des promotions de jeunes médecins plus nombreuses.
Il convient, en effet, d'être attentif aux phénomènes de concurrence entre territoires. L'exercice coordonné doit permettre d'améliorer l'attractivité de certains territoires et l'année de professionnalisation générera un apport rapide en médecins. Ce sont les territoires les plus ruraux et les périphéries des grandes villes qui rencontrent le plus souvent des difficultés.
Au sujet du statut des médecins, il me semble que la situation nous encourage à rester ouverts et à faciliter l'ensemble des exercices, à n'inciter à aucun et à ne contraindre aucun.
Je rappelle aussi que les médecins généralistes doivent rester les pivots de l'exercice coordonné. J'ai entendu qu'ils étaient mal payés, mais la somme de 25 euros correspond à la consultation de base, que les aides complémentaires et versements forfaitaires viennent compléter. Ces derniers représentent désormais plus de 15 % de la rémunération des médecins généralistes.
En ce qui concerne le temps médical, notre proposition de loi devrait en libérer grâce à l'exercice coordonné, au travail avec d'autres professionnels de santé et aux permanences partagées.
Enfin, je partage avec Bernard Jomier l'idée que les services publics n'ont plus les moyens de leur action. Je retiens aussi de son intervention l'importance du rôle joué par les collectivités territoriales en termes d'accueil, de prise en charge de l'environnement de l'installation du médecin, quel que soit son statut ; ce rôle devrait être reconnu dans la loi.