Intervention de Gilles Lazimi

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 17 novembre 2022 : 1ère réunion
Audition de M. Gilles Lazimi et Mme Catherine Vidal membres du hce

Gilles Lazimi, co-président de la commission « Santé, droits sexuels et reproductifs » du HCE :

Nous avons présenté nos rapports aux différents ministres à chaque fois. Quelques recommandations ont été reprises dans des lois, mais pas toutes.

Reprenons les quatre recommandations phares de ce présent document. En termes de formation initiale des étudiants en genre et santé, les études sont rares. Dans la faculté dans laquelle je travaille, nous observons une petite amélioration, grâce à des enseignements sur la prise en charge des femmes en matière de maladies cardiovasculaires, ou à quelques diplômes universitaires (DU). Les étudiants qui se spécialisent en cardiologie commencent à y être formés, mais je ne vois pas, pour l'heure, de grande évolution. Nous devons les accompagner et nous assurer que ces thèmes, comme celui des violences faites aux femmes, sont bien abordés dans les facultés. S'il n'y a pas de question d'internat ou d'évaluation réelle de ce qui se fait dans ces établissements, une éventuelle amélioration de la situation demandera un temps fou. Malgré les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS), nous constatons en effet que bon nombre d'étudiants ne reçoivent pas de formation sur les violences.

Pour suivre les recommandations, nous avons besoin de moyens. Je vous indiquais plus tôt que le HCE ne comptait que des bénévoles, et trois chargés de mission. Ce n'est pas suffisant. Mes collègues, lorsque je les interroge, me font part d'un manque de budgets pour traiter les problématiques cardiovasculaires dans les études liées aux femmes.

Il en va de même de la formation médicale continue. Là aussi, pour tous les sujets importants tels que le genre et la santé, les violences ou les inégalités sociales, les formations à destination des professionnels médicaux libéraux ne durent que trois jours par an. Elles ne sont en outre pas obligatoires, bien qu'elles devraient l'être.

Si nous voulons améliorer l'accompagnement et la prise en charge des violences, lutter contre les inégalités sociales de santé, montrer aux médecins à quel point nous sommes pétris de stéréotypes, nous avons besoin de nous déconstruire. Pour ce faire, nous aurons besoin de créer une chaire, de nommer des enseignants sur ces sujets, de participer à des études. En effet, si nous commençons à voir quelques thèses de médecine générale sur les violences gynécologiques - ce qui reste tout de même insuffisant -, il n'y a rien en matière de genre et santé, si ce n'est des études sur la transidentité. Sans indication claire et ferme du ministère, des universités, de la recherche et de la santé, le sujet ne se mettra pas en place.

Dans les années 1990, lors de la mise en place des traitements de substitution pour les patients toxicomanes, rien n'était fait. À un moment donné, le ministre de la santé a annoncé que seraient organisées des formations prises en charge avec la Direction générale de la santé (DGS). Ainsi, les médecins pouvaient se former. Des professionnels ont été nommés dans toutes les provinces pour former leurs collègues. Ces démarches actives ne demandent pas seulement d'agir mais également de s'assurer de leurs mises en place, et d'y associer les moyens nécessaires. Nous attendons toujours la chaire en « genre et santé ».

Concernant les femmes précaires, là aussi, lorsque nous constatons le non-recours aux prises en charge et le fait qu'elles sont les premières touchées par la précarité, nous devons travailler, notamment sur la médecine du travail. Nous l'avons déjà dit en 2017, les critères de pénibilité ne sont pas adaptés aux femmes. Les temps de transport ne sont pas pris en charge dans la journée. C'est incroyable. Les risques psychosociaux ne sont, en outre, pas reconnus comme des maladies professionnelles. Là aussi, les critères doivent être revus. Nous le demandons depuis 2017. Quant à parler de la parité et de la rémunération, nous n'y sommes, là aussi, pas encore. Sans position volontariste et sans pénalités financières vers toutes les institutions, associations ou entreprises, nous n'y parviendrons pas.

S'agissant de la lutte contre les stéréotypes, notre rapport sur l'éducation à la sexualité montre que près de 60 % des établissements ne mettent toujours pas en oeuvre les actions prévues.

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