L'ANEB regroupe des élus locaux qui représentent leur territoire à travers différents outils, qu'il s'agisse des commissions locales de l'eau (CLE), des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) ou des syndicats de rivière à propos de la question du grand cycle de l'eau.
Il existe un certain nombre de points de convergence entre les propos de Thierry Burlot et ceux que Bruno Forel et moi-même allons tenir devant vous.
Nous sommes fondamentalement attachés à deux principes fondamentaux. En premier lieu, l'eau est un bien commun - et ce qui s'est produit l'été dernier sur la ressource hydrique témoigne de la nécessité de rappeler constamment ce point de vue. En second lieu, nous tenons profondément au fait que le bassin versant soit considéré comme la bonne échelle pour aborder la question du grand cycle de l'eau.
Je le dis dans la mesure où nous avons connu ces dernières années plusieurs bouleversements liés à des modifications législatives, comme la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) ou la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), qui ont modifié sensiblement le cadre juridique, notamment à l'échelle des collectivités qui étaient les fers de lance de ces sujets, en particulier les conseils départementaux, avec la création de la compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » (GEMAPI), exercée par le bloc communal à travers les EPCI à fiscalité propre ou les métropoles. Les choses se mettent en place progressivement, mais elles sont loin d'être abouties à l'échelle nationale. Il existe encore de grandes disparités en la matière.
En ce qui nous concerne, nous ne sommes pas favorables à un grand soir ou à un nouveau bouleversement du cadre juridique, mais plutôt à un certain nombre de propositions visant à clarifier, renforcer et pérenniser les outils qui existent, qui ont parfois du mal à se déployer ou qui ne bénéficient pas d'un poids juridique et politique suffisamment affirmé.
Mettre en place sur l'ensemble du territoire des outils de planification territoriale est pour nous une nécessité absolue, or ce n'est pas le cas aujourd'hui. Les CLE et les SAGE sont des outils qui ne sont pas déployés sur l'ensemble du territoire. Il nous semble que la priorité est de partager des outils de planification avec l'ensemble des acteurs de la question du grand cycle - élus locaux, monde agricole et industriel.
C'est le gage d'une ouverture du dialogue avec l'ensemble des parties prenantes et de l'élaboration d'un document stratégique partagé. On a bien vu, récemment encore du côté de la Charente, apparaître des conflits d'usage qu'il est indispensable d'éviter à tout prix. Selon nous, le meilleur chemin pour apaiser les tensions consiste à partager une vision commune et stratégique à moyen et long termes à propos de la manière dont nous souhaitons aborder les questions relatives à la gestion du grand cycle de l'eau.
Nous sommes également très attachés à la nécessité de renforcer l'ingénierie publique pour appuyer la mise en oeuvre de la stratégie collective préalablement déterminée. Nous pensons en particulier à la tarification et au renforcement des compétences des EPTB, qui ont pour vocation d'oeuvrer à l'échelle des CLE ou des inter-CLE. Ce sont des outils qui doivent garantir la cohérence et l'intervention de la maîtrise d'ouvrage à l'échelle du bassin versant.
La GEMAPI présente des aspects extrêmement positifs, notamment le fait qu'elle ait été fléchée vers le bloc communal, dans la mesure où elle renvoie à la question de l'eau et du grand cycle et à celle de l'aménagement du territoire.
Il nous semble cependant qu'il existe un trou dans la raquette. Dès lors que la GEMAPI s'installe à l'échelle du bloc communal sans outils de gouvernance, de maîtrise d'ouvrage et d'ingénierie à l'échelle du bassin versant, le risque à terme est une sorte de saucissonnage et un repli des EPCI sur leur propre territoire, que l'on peut parfois constater, sans qu'il soit tenu compte de l'absolue nécessité qu'amont et aval bénéficient d'une approche unifiée, tout comme le monde rural et le monde urbain.
Vous l'aurez compris, selon nous, la politique du grand cycle de l'eau doit être une politique de solidarité et de cohérence entre les territoires. Nous pensons absolument nécessaire de déployer non seulement des EPTB, mais également d'en clarifier et d'en renforcer les compétences ce qui, selon nous, n'est pas aujourd'hui suffisamment le cas.