On l'a dit, la ressource en eau soulève aujourd'hui une vraie question.
En réalité, la difficulté se situe entre nos schémas administratifs à l'échelon des territoires, la manière dont on a organisé l'administration du territoire et la réalité du fonctionnement. En effet, nos territoires sont administrés à l'intérieur de limites administratives diverses - régions, départements, intercommunalités, communes - qui ne correspondent pas aux périmètres hydrologiques. Il est donc essentiel de trouver une articulation permettant, face à une ressource dont la pénurie est gravissime, de trouver un moyen de renforcer la cohérence entre la répartition territoriale administrative classique et le mode de gestion et de compréhension du système de l'eau, qui s'établit par bassin versant.
Ce n'est pas une nouveauté, les EPTB permettent de le faire. C'est parfaitement efficace, apprécié et souvent mondialement copié.
Il faut, pour arriver à gérer les choses convenablement, descendre plus bas dans la maille territoriale - et c'est toute la difficulté : l'eau se traite au niveau très local tout en bénéficiant d'une vision et d'une approche globales.
Comment arriver à faire en sorte que l'eau, qui se gère sur un périmètre hydrographique, puisse être appréhendée au sein de périmètres administratifs qui n'épousent pas le périmètre de fonctionnement ? C'est ce que propose de faire l'EPTB, en s'appuyant - et c'est un bon système - sur la maille la plus territoriale qui soit, le bloc communal.
Il est vrai qu'il existe un certain nombre de variantes. Certains EPTB intègrent aujourd'hui des départements et des régions, certains bassins versants pouvant être de grande taille. On peut travailler sur des mailles avec un EPTB global alors que plusieurs autres vont travailler sur des sous-bassins.
Cependant, il faut donner des moyens de fonctionnement à cette échelle. Il nous semble intéressant que la compétence première de l'eau reste au bloc communal et qu'on associe l'échelle départementale et régionale pour une intervention d'ensemblier, dans une coopération au plus près du terrain, à l'échelon communal et intercommunal.
Il est vrai qu'il manque un rapport de prise en compte entre les SDAGE et les SRADDET. Cependant, cela existe avec les SAGE, les SCoT, les PLU ou les PLUi. Ils sont décrits comme tels : il doit y avoir par définition un rapport de compatibilité entre chaque document.
Or force est de constater que ce rapport de compatibilité, qui devrait être à mon sens une des préoccupations premières de l'action de l'État dans les territoires, n'est pas suffisamment mis en oeuvre. Si l'on insistait davantage sur le pouvoir régalien de l'État pour faire exécuter les textes et pour que chaque document régisse les constructions et le développement urbain, on arriverait sans doute à de bien meilleurs résultats.
Il ne faut pas oublier que la pénurie que nous vivons n'est pas due à une mauvaise gestion du petit cycle de l'eau. Les lois qui ont appelé à passer à l'échelle intercommunale et qui ont favorisé la connexion des petits systèmes vers des systèmes de plus grande assiette permettant plus de sécurité d'approvisionnement et de qualité vont dans le bon sens. Ce travail est en cours, et c'est une très bonne chose.
Au-delà, si nous connaissons la pénurie, c'est parce que notre grand cycle de l'eau est en train de subir des modifications importantes.
Nous pouvons améliorer la situation et faire en sorte que ce grand cycle, sans revenir à ce qu'il était, ne nous joue pas de tours. Depuis dix à quinze ans, les sols s'assèchent en permanence. Les scientifiques le démontrent : l'eau est et sera une denrée plus rare qu'autrefois.
L'aménagement du territoire, la gestion de nos paysages et de nos villes, la manière dont on urbanise peuvent conforter notre capacité à continuer de répondre à nos besoins fondamentaux. Sans doute faudra-t-il regarder la manière dont nous utilisons l'eau, faire des choix culturaux et industriels plus économes.
Cependant, c'est bien le grand cycle qu'il faut arriver à mieux maîtriser. Ce rapport qui détermine l'aménagement du territoire économique et industriel est essentiel. Il me semble qu'en donnant aux EPTB une existence juridique qui attire plus l'action politique de terrain vers ce genre d'établissement, en leur conférant une véritable capacité à peser sur les documents d'urbanisme, nous serons capables, si l'État veille à une bonne articulation, de répondre à ce défi.
Ce défi est selon moi perçu par chacun. Après les Assises de l'eau, nous avons eu un Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique, et des annonces fortes sont à venir. Le sujet est donc prégnant. Nous serions inquiets que l'on cherche à tout révolutionner, alors que nous avons une bonne base. En revanche, une plus grande rigueur dans l'application des textes et un renforcement de la gestion de l'eau par bassin sur la totalité du territoire nous semble une des réponses les plus adaptées.