Ma question s’adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
Monsieur le ministre, vous avez présenté hier une réforme qui allonge de nouveau de deux ans l’âge de départ à la retraite. Vous avez balayé nos solutions alternatives pour combler un déficit que vous dramatisez sciemment et qui n’aurait jamais dû être un problème si le Fonds de réserve des retraites (FRR) avait été non pas siphonné, mais alimenté, comme cela était prévu.
Vous vous gardez de présenter le bilan de la contre-réforme de 2010, que vous vous apprêtez à copier : une baisse tendancielle du montant des pensions comme de la durée de vie à la retraite.
Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), la réforme de 2010 a déjà fait perdre presque un an de durée de retraite à la cohorte 1980. En cumulant toutes les réformes accomplies depuis 2010, plusieurs générations perdront jusqu’à vingt mois de durée de retraite.
Ces réformes ont affecté une grande partie des gains d’espérance de vie au travail, et la vôtre va empiéter sur les années de vie à la retraite en bonne santé. Il n’y a rien de plus inégalitaire, alors que, selon l’Institut national d’études démographiques (Ined), l’écart de vie en bonne santé est de dix ans entre catégories socioprofessionnelles.
Votre réforme s’en prend au droit au repos de tous les travailleurs, mais cogne plus dur sur les classes populaires, sur les ouvriers et sur les employés. Elle va allonger le sas de précarité de ceux qui ne sont ni en emploi ni en retraite, mais, pour partie, au chômage ou au revenu de solidarité active (RSA), et dont vous réduisez en même temps les droits.
L’attaque contre le monde du travail et la protection sociale est frontale et systémique. Elle dévoile ce que recouvre le credo du « travailler plus », pour perdre sa vie à la gagner, jusqu’à détruire l’habitabilité de notre planète.
Monsieur le ministre, considérez-vous vraiment que, après une crise sanitaire qui a questionné la place et le sens du travail, à l’heure des urgences, il est responsable d’imposer une réplique de la contre-réforme inégalitaire de 2010, et cela contre l’avis d’une très large majorité des Français et des représentants syndicaux ?