Intervention de Jocelyne Guidez

Réunion du 11 janvier 2023 à 15h00
Crise du système de santé — Débat d'actualité

Photo de Jocelyne GuidezJocelyne Guidez :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’importance de notre débat m’invite à commencer mon propos par une citation de William Arthur Ward : « Le pessimiste se plaint du vent ; l’optimiste espère qu’il va changer ; le réaliste ajuste ses voiles. »

Crise des urgences, tensions engendrées par la triple épidémie de covid-19, de grippe et de bronchiolite, déprogrammation de soins médicaux, déficit criant de personnels hospitaliers, postes vacants, démissions, soignants en burn-out : la liste des notes de cette triste mélodie est bien longue.

La situation de l’hôpital continue d’inquiéter dans un contexte où la demande augmente du fait du vieillissement de la population. Nos services publics d’urgence connaissent des sous-effectifs chroniques et restent sous tension pour faire face à un afflux important de patients.

Cette situation inadmissible, qui continue à se dégrader depuis l’été 2022, est le révélateur de la crise profonde que traverse notre système de santé et témoigne du poids important de l’hôpital, en particulier de l’hôpital public, dans la prise en charge des urgences.

L’engorgement des urgences résulte d’une conjonction d’éléments défavorables.

D’abord, l’accès à une consultation chez un médecin généraliste dans un délai raisonnable devient de plus en plus compliqué. La question du temps médical disponible continuera de s’aggraver avec la croissance des départs à la retraite non remplacés.

Ensuite, les praticiens ne s’installent pas de façon harmonieuse sur le territoire. Le problème des déserts médicaux est récurrent, non seulement en secteur rural et en outre-mer, mais aussi en zone urbaine.

Enfin, il existe un déficit d’information sur la conduite à tenir en cas de problème de santé. Ainsi, de nombreux patients qui se rendent aux urgences de leur propre chef le font faute d’une meilleure orientation.

Il importe de mettre en place des mesures alternatives pour accueillir des soins non programmés, et ce afin de répondre aux besoins des patients qui souffrent d’un mal qui ne relève pas de l’urgence vitale, ce que l’on appelle la petite « bobologie ».

Il serait aussi pertinent d’inciter les médecins de ville installés dans les maisons de santé à maintenir une permanence particulièrement les week-ends, afin de désengorger les urgences.

Néanmoins, ce dispositif ne peut être imposé au niveau national tant les situations sont différentes d’une région à une autre. En revanche, les agences régionales de santé peuvent jouer un rôle moteur dans différentes expérimentations. Je vous mets cependant en garde : à trop attendre, la voie de l’obligation de garde finira par s’imposer.

Au-delà, des adaptations du terrain se révèlent nécessaires : une meilleure coordination des soins, un meilleur partage des compétences, une meilleure répartition du pouvoir de décision et des responsabilités entre médecine de ville et hospitalisation.

Augmentation des capacités d’accueil en médecine de ville, accompagnement au travail collectif, développement de la télémédecine de manière bien encadrée, amélioration de la qualité de vie au travail, réduction du temps perdu dans les démarches administratives sont d’autres pistes de réflexion.

La pénurie de soignants, d’infirmiers et de médecins risque de s’installer dans la durée. Force est de constater que l’augmentation des salaires prévue dans le cadre du Ségur de la santé n’a pas entraîné une nette évolution des recrutements. Afin de résoudre le problème de ressources humaines en santé, il est essentiel d’établir un plan pluriannuel.

Mes chers collègues, face à cette crise, aucune solution simple n’existe. Mais, pour reprendre les mots de Winston Churchill, « mieux vaut prendre le changement par la main avant qu’il ne nous prenne par la gorge ». Hélas, je crois que c’est déjà fait…

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