Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, tous les secteurs de la santé dans notre pays traversent une crise profonde, qu’il s’agisse de la médecine de ville, de l’hôpital ou des professions paramédicales. Tous les acteurs de santé font état de leur épuisement et de leur découragement.
La santé est un bien commun. Chaque citoyen devrait pouvoir se faire soigner de manière optimale, ce qui n’est plus le cas, loin de là, depuis de nombreuses années.
La crise actuelle renforce ma conviction profonde : il est absolument nécessaire de créer un nouveau service public de la santé et il est indispensable que ce dernier soit fort.
Rappelons une évidence : le service public est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas.
Les réactions des différents acteurs de la santé à l’intervention présidentielle de vendredi dernier sont majoritairement marquées par un sentiment de déception.
Le président Macron est fidèle à sa ligne politique avec, par exemple, la remise en cause des 35 heures à l’hôpital, vieille lune de la droite. La réponse au malaise actuel de l’hôpital serait de faire travailler plus les personnels hospitaliers sans que ces derniers gagnent plus.
Rappelons que, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, la majorité présidentielle a voté la possibilité pour les médecins et les infirmières de travailler jusqu’à 72 ans : quel cynisme !
Il est urgent de dégager des vraies solutions pour répondre à la pénibilité des métiers. Beaucoup d’infirmières, par exemple, abandonnent leurs fonctions moins de cinq ans après leur diplôme.
Certaines solutions préconisées peuvent sembler aller dans le bon sens, comme la remise en cause de la T2A à l’hôpital ; mais prenons garde aux modalités d’application.
En outre, madame la ministre, pouvez-vous nous préciser ce que sont « les objectifs de santé à l’échelle d’un territoire » évoqués par le Président de la République ?
Le chef de l’État a aussi mentionné les conseils d’administration des hôpitaux, qui, semble-t-il, sont censés se substituer aux conseils de surveillance actuels. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?
Il vous appartiendra de mettre en application les annonces présidentielles, mais – force est de le constater – vous paraissez affaiblie par la nécessité, éprouvée par le Président de la République, de monter en première ligne.
La réorganisation de la médecine de ville a peu été abordée, alors qu’elle constitue le cœur du problème. Les dispositifs d’incitation ont échoué : même l’ancienne ministre de la santé Roselyne Bachelot le dit, alors qu’ils ont été créés sur son initiative.
Au titre des gardes, on ne prévoit pas de mesure contraignante pour les médecins libéraux. L’obligation de garde permettrait pourtant de décharger les urgences hospitalières des « petites urgences ».
En parallèle, les conditions d’exercice, pourtant difficiles, des internes en médecine hospitalière ne font l’objet d’aucune réflexion.
Rappelons que 30 % de nos concitoyens vivent dans un désert médical, que 6 millions de Français n’ont pas de médecin traitant et que 600 000 d’entre eux souffrent d’une affection de longue durée. Sur ce point précis, les mesures annoncées vendredi dernier ne rassurent pas.
La délégation de soins et, donc, la possibilité pour les paramédicaux de prescrire est une orientation intéressante, mais dangereuse, si elle n’emporte pas l’adhésion des professionnels de santé et si elle ne s’inscrit pas dans un projet global.
Le Président de la République semble avoir totalement renoncé au volontarisme politique dans le domaine de la santé : pas de moratoire sur les fermetures de lits ; incertitudes quant aux moyens ; pas d’annonce sur les déserts médicaux.
La santé a besoin d’un plan global et cohérent, loin des annonces à l’emporte-pièce. C’est pourquoi nous, sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, sommes favorables à un plan massif d’investissement dans le domaine de la santé.
En conclusion, j’insiste sur l’importance d’associer l’ensemble des parlementaires, notamment les sénateurs, à la construction d’un projet global de santé pour notre pays, seul à même de garantir le droit à la santé pour tous nos concitoyens.