Monsieur le sénateur Jacquin, vous avez évoqué la situation des travailleurs des plateformes et la meilleure façon de leur reconnaître des droits sociaux collectifs. Le droit français est connu : il a été fixé dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités, qui a donné lieu à deux ordonnances, elles-mêmes ratifiées par le Parlement – en tout cas la première –, et qui fixent justement ces principes de représentation.
Depuis, il y a eu l’initiative de la Commission européenne visant à faire adopter par le Parlement et par le Conseil une directive sur le droit des travailleurs de plateforme. Vous dites que la France est isolée sur le sujet.
Lors du dernier Conseil des ministres du travail de l’Union européenne, le 8 décembre 2022, il n’y a eu aucune majorité ni pour le projet de directive ni contre. La France, que vous jugez isolée, a défendu de son côté une position qui était partagée par une bonne douzaine de pays européens. Convenez que, lorsque le Conseil se divise en trois tiers, on ne peut pas vraiment parler d’isolement pour notre pays.
Nous continuons à discuter. La présidence suédoise a indiqué vouloir remettre ce projet de directive à l’ordre du jour, et nous estimons que les travaux pourraient aboutir à la fin de la présidence espagnole, c’est-à-dire à la fin du second semestre de 2023.
Nous sommes convaincus de pouvoir trouver, dans le dialogue, une position qui soit respectueuse de chacune des législations nationales, tout en permettant de garantir le droit des travailleurs de plateforme.
Dans l’attente, nous continuons à travailler à l’échelon national. À la fin du mois d’octobre dernier, j’ai installé les premiers groupes de travail à la suite des élections visant à désigner les représentants tant des plateformes que des travailleurs des plateformes. Le dialogue est fécond, puisque, dans quelques minutes, avec Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports, nous rejoindrons les locaux de l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (Arpe) pour assister, avec les représentants des chauffeurs et des plateformes, à la signature du premier accord social en la matière. Cet accord porte sur le tarif minimum des courses et il est soutenu par les représentants de 70 % des chauffeurs.
C’est la démonstration que le choix que nous avons fait de respecter le principe d’indépendance des chauffeurs, dans la mesure où leurs droits sont respectés, peut se marier avec l’idée d’une protection collective. Cet accord, qui en appelle d’autres, nous permet de montrer à nos partenaires européens que nous pouvons concilier l’indépendance, l’entrepreneuriat et la protection des droits sociaux.