Je suis élue depuis très longtemps sur la zone Roubaix-Tourcoing et je suis universitaire. À ce titre, j'ai rencontré, il y a une vingtaine d'années, un jeune qui s'appelait Abdelkader Haroune. Il est devenu commissaire général de police à Roubaix.
Abdelkader Haroune a le profil type de quelqu'un qui aurait pu déraper, comme beaucoup de jeunes de banlieue, et qui s'est raccroché à la police pour se construire. Il a créé les Chemins de la réussite, association qui aide les enfants et les jeunes qui se sentent discriminés dans le cadre de leurs études pour les aider à évoluer et à accéder aux concours. Dernièrement, lors d'un colloque que nous avons organisé ensemble à la mairie de Tourcoing, des jeunes entrés dans la police - beaucoup d'origine maghrébine, issus de quartiers ou de classes sociales défavorisés... - ont témoigné de leur fierté d'avoir intégré la police et de leur confiance en celle-ci. Leurs témoignages laissaient penser que la gendarmerie, la magistrature et surtout la police pouvaient vraiment jouer le rôle d'ascenseur social. Tous avaient dû franchir de nombreuses étapes avant d'arriver à leur poste, et rencontré de grandes difficultés pour trouver des stages. Avec Abdelkader Haroune, nous avons créé un tutorat pour épauler les jeunes désirant entrer dans la police.
Les policiers issus des quartiers risquent de subir des discriminations, leurs anciens copains de virées les prenant pour cibles. Souvent, cela ne va pas beaucoup plus loin que des attaques verbales : on les traite de « vendus ». L'école de police de Roubaix en a pris acte et veille à les soutenir face à de telles réactions.
Il me semble que l'on voit moins de réactions de ce type dans la gendarmerie. Pouvez-vous me le confirmer ? Les jeunes qui arrivent en caserne paraissent plus encadrés dès le départ. Il semble en aller de même dans la magistrature.
Vous appelez, monsieur Vigouroux, à un élargissement du champ des jurys de concours. J'ajouterai, s'agissant des concours, qu'il faut éviter certaines matières, comme la culture générale, que ces jeunes n'ont pu acquérir du fait de leurs origines.