Je souhaite la bienvenue aux quatre intervenants de cette deuxième table ronde consacrée à la prise en charge des femmes victimes de violences en temps de guerre. Je rejoins tout de même l'intervention de Pierre Laurent, l'essentiel est dans la prévention. En l'absence de celle-ci, la prise en charge reste nécessaire.
Ghislaine Doucet est conseillère juridique principale de la Délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Paris. Le docteur Thomas Charbonnier est gynécologue-obstétricien et administrateur de l'ONG Gynécologie sans Frontières (GSF). Muy-Cheng Peich, quant à elle, est directrice de l'éducation, de l'impact et de la recherche au sein de l'ONG Bibliothèques sans frontières (BSF). Elle vient de signer un partenariat avec la représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit. Ce partenariat repose notamment sur une approche holistique pour les survivantes et sur l'expertise développée par BSF dans l'organisation d'espaces sécurisés au sein desquels elles pourront avoir accès à des services de soutien médical, psychologique, juridique, ainsi qu'à des activités éducatives et des formations professionnelles. Enfin, Justine Masika Bihamba interviendra en visioconférence depuis la République Démocratique du Congo. Elle est présidente de l'ONG Synergie des femmes pour les victimes des violences sexuelles (SFVS), qui oeuvre pour protéger les femmes victimes de ces violences, plus particulièrement dans le Nord-Kivu, une province de l'est de la RDC.
Merci à vous pour votre participation ce matin. Nous entendrons avec un grand intérêt les actions concrètes et les programmes entrepris par les différentes organisations que vous représentez afin de prendre en charge les femmes victimes de violences en temps de guerre.
Nous savons que les séquelles physiques comme psychologiques sont considérables mais les conséquences économiques et sociales le sont également. Nous en avons eu une illustration difficile à entendre lors de la première table ronde.
Il est fondamental que les victimes soient reconnues comme victimes de guerre et qu'elles bénéficient de l'assistance médicale, psychologique, juridique et matérielle qu'implique leur situation.
Sur le plan médical, elles doivent avoir droit à des soins médicaux généraux, des chirurgies réparatrices et un accompagnement psychologique, voire psychiatrique.
Sur le plan juridique, il est indispensable de former des professionnels (avocats, juristes, forces de l'ordre...) à des méthodes d'enquête et d'écoute des victimes précises et efficaces, afin d'entamer des poursuites juridiques et de condamner les bourreaux. À cet égard, la question de la collecte de preuves en matière de violences sexuelles commises dans le cadre de conflits est primordiale. Juger ces crimes constitue une étape indispensable à la reconstruction des victimes.
Sur le plan matériel, il s'agit de soutenir la réhabilitation économique et sociale des femmes survivantes. Leur reconstruction passe en effet par la construction de leur autonomie.
Estimez-vous que nous avons progressé dans l'aide apportée aux victimes, à la fois l'aide immédiate et le soutien à plus long terme pour les aider à se reconstruire ?
Qu'en est-il des financements aujourd'hui ? Le dernier rapport d'activité du secrétaire général de l'ONU indique que la part de l'aide bilatérale à l'égalité des sexes dans les contextes fragiles et touchés par des conflits reste de 5 %. Lors d'une table ronde que nous avions organisée en 2019, les participantes avaient également évoqué des défaillances liées à l'utilisation et à la répartition de l'aide allouée aux victimes. Ces critiques sont-elles toujours d'actualité ? Alors que nous examinons actuellement le projet de loi de finances pour 2023, ces questions de financement sont bien sûr dans tous nos esprits.
Je laisse sans plus tarder la parole à Ghislaine Doucet, du Comité international de la Croix-Rouge.