Intervention de Loïc Hervé

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 24 novembre 2022 : 1ère réunion
Table ronde sur les femmes en temps de conflits armés

Photo de Loïc HervéLoïc Hervé :

Merci Madame la Commissaire générale. Je laisse désormais la parole au commandant Claire, officier de l'Armée de l'air et de l'espace.

Commandant Claire. - Bonjour à tous. Je vous parlerai aujourd'hui à mon niveau et sous le prisme de l'armée de l'air et de l'espace, puisque j'y suis officier. J'aborderai mon parcours de manière simple, vous exposerai mes motivations et les raisons de mon engagement initial, avant de vous expliquer ce que je fais aujourd'hui.

Je suis affectée sur la base aérienne 709 de Cognac, qui accueille notamment l'école de l'aviation de chasse et la 33e Escadre de surveillance, de reconnaissance et d'attaque (Esra). Je fais partie de cette unité depuis trois ans. Je suis aviatrice, et très fière de l'être. Je suis officier renseignement, actuellement cheffe du bureau appui renseignement aux opérations de la 33e Esra. Il s'agit d'une unité de combat qui met en oeuvre les systèmes de drones Reaper. Ceux-ci sont des drones de moyenne altitude longue endurance (Male), de l'Armée de l'air et de l'espace. Ils sont mis en oeuvre en opération, entre autres, sur la base aérienne projetée de Niamey au Niger.

J'ai participé à différentes opérations extérieures depuis mon engagement en 2005, sur des théâtres d'opération très différents, pour des missions très différentes. À ce jour, au sein de la 33e Esra, j'ai réalisé deux opérations extérieures. Je m'apprête à partir pour la troisième en janvier.

Au sein de cette escadre, je suis directement intégrée en tant que membre d'équipage des systèmes Reaper. Nous sommes quatre personnels : un pilote à distance, un opérateur capteur, un coordinateur tactique - c'est moi - et un opérateur images. Au sein de l'équipage, je suis comme un chef d'orchestre en lien avec les structures de commandement et de contrôle et l'équipage pour atteindre l'effet militaire qui nous est donné. Nous disposons de multiples écrans et systèmes d'informations et de communication, et essayons de gérer au mieux la mission. Nous participons également à différents évènements sur le territoire national, tels que les dispositifs particuliers de sûreté aérienne, bulles de protection que vous pouvez trouver le 14 juillet. Nous prenons également part à des exercices majeurs de type Volfa, entraînements des unités de l'armée de l'air et de l'espace aux conflits de haute intensité, notamment.

Vous le voyez, l'Armée de l'air est engagée en permanence, tant sur le territoire national qu'en opérations extérieures. Mon unité l'est encore plus. Je suis très fière de participer à ces missions, 24 heures sur 24.

Permettez-moi de vous présenter mon parcours, celui d'une femme ayant pu progresser au sein de l'institution, et plus particulièrement au sein de l'Armée de l'air et de l'espace. Je me suis engagée en 2005 en tant que sous-officier, au grade de sergent, dans le domaine du renseignement. Cela m'a permis de constater que cette armée était la plus féminisée, puisque nous atteignons aujourd'hui 25 % de femmes. J'ai suivi ma scolarité à l'école des sous-officiers, implantée sur la base aérienne de Rochefort. J'y ai vécu mes premières expériences en tant que militaire.

Le coeur de mon récit vise à prouver qu'une femme a toute sa place au sein de l'armée, comme un homme, tant qu'elle est motivée et qu'elle veut servir la France. Après quelques années, j'ai pu bénéficier de l'escalier social, grâce à mon envie de progresser et à ma motivation. J'ai réussi le concours interne pour devenir officier. L'Armée de l'air et de l'espace offre cette chance de pouvoir commencer tout petit, d'entrer par la petite porte, et de s'élever par la suite, si on en a l'envie et l'ambition. Aujourd'hui, me voilà officier supérieur. À l'école militaire de l'air, aujourd'hui remplacée par l'École de l'air et de l'espace, j'ai également pu passer une année d'échange à l'école de l'air allemande. Cette expérience a été très enrichissante. J'ai pu en tirer des comparaisons entre les systèmes français et allemands et sur la place des femmes dans ces deux armées.

Pourquoi ai-je voulu m'engager en tant que militaire ? À l'issue de ma licence en langues étrangères appliquées, j'avais envie d'autre chose. Je voulais servir mon pays, adhérer à une cause qui me tenait à coeur, être force de convictions et faire un métier que je ne pouvais faire qu'en étant militaire. C'est ce qui a guidé mon parcours. Je souhaitais également adhérer aux valeurs militaires que sont le respect, l'exemplarité, la loyauté, l'abnégation et la volonté de servir la France par le métier des armes. J'ai servi dans différentes unités, qui m'ont permis de me confronter à l'exercice des responsabilités, toujours au niveau qui m'était donné, tant en opérations que sur le territoire national, dans des contextes parfois très différents. C'est cette variété de situations qui rend l'exercice du commandement très enrichissant à mon sens.

Se remettre en question, faire preuve de courage, de loyauté, être juste, voilà des qualités que devraient à mon sens avoir tous les chefs, qu'ils soient des hommes ou des femmes. Le débat qui se tient aujourd'hui est très intéressant. Nous voyons que le ministère des armées a mis de nombreuses actions en place pour que nous puissions trouver notre place, évoluer au même titre que les hommes, et pour que nos compétences soient aussi valorisées que les leurs.

Pour ma part, être une femme ne constitue pas un obstacle tant que l'on est motivée et qu'on a de l'envie et de la volonté. Il faut également avoir du caractère. À mes yeux, nos contraintes et nos chances de progresser restent les mêmes que pour un homme. Ce qui est plus délicat, à mon sens, est de trouver l'équilibre entre l'engagement opérationnel et la vie familiale. Cela l'est autant pour un homme que pour une femme. Vous avez pu le constater, nous sommes engagés, partout, tout le temps, en permanence. Quand on est jeune, on est plein d'ambition, on veut voyager partout. Des questions se posent lorsqu'on commence à avoir une vie de famille. J'insiste donc sur la nécessité de trouver un équilibre entre la réussite professionnelle et la vie familiale accomplie.

Merci beaucoup pour votre témoignage. Je me tourne maintenant vers notre dernière intervenante de cette matinée riche, Anna Kvit, qui intervient en visioconférence depuis l'Ukraine, en anglais. Ses propos seront traduits par une interprète.

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