Le premier sujet est très complexe, et vous donner une réponse rapide me semble un peu problématique. Le fait que les femmes soient surreprésentées dans les professions de santé, exposées au premier chef, a augmenté la tension sur ces métiers. En tant qu'universitaire ayant assuré la continuité pédagogique, j'ajouterai que nous avons articulé la continuité de service public et le télétravail. J'ai moi-même télétravaillé pendant cette période, en étant confinée seule avec deux jeunes enfants. Se posait ici la question de travailler en distanciel, dans des conditions dégradées, et dans des conditions de stress importantes.
Les conséquences du télétravail sont encore, je pense, mal mesurées sur la santé physique, mais aussi mentale. Des travaux sont en train de s'élaborer mais nous commençons seulement à en prendre la mesure. Je suis frappée par le fait que lorsque le travail a repris en conditions normales, il n'y a eu que peu de réflexions sur ce qui s'était passé et ce qui avait été vécu par les femmes qui travaillaient dans ces conditions pendant la crise sanitaire et, plus généralement, par les gens qui n'ont pas cessé de travailler. Nous attendons les résultats des travaux en cours.
Pour ce qui est des leviers à actionner, introduire de manière systématique le concept de genre pour analyser les politiques publiques déployées en matière de santé ou d'incitation à l'emploi et au retour à l'emploi pourrait être intéressant. Considérer que les politiques de prévention en matière de santé au travail ne sont que peu, voire pas genrées, et accompagner la formation des inspecteurs et inspectrices du travail à ce titre pourrait présenter un intérêt concret.
Enfin, la formation des professionnels de santé me semble également primordiale sur les questions de santé des femmes ou sous le prisme du genre. Je forme moi-même des étudiants en médecine et je sais que cet aspect est anecdotique dans notre pays en général, dans les cursus médicaux en particulier. Il est absent de la formation des médecins du travail. Les travaux des ergonomes que je citais plus tôt mériteraient de faire partie de leur bagage de base.