Intervention de Édouard Fritch

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 20 octobre 2022 : 1ère réunion
Évolution institutionnelle outre-mer — Audition de Mm. édouard Fritch président de la polynésie française et gaston tong sang président de l'assemblée de la polynésie française

Édouard Fritch, président de la Polynésie française :

Effectivement, ce débat, autour de la notion de citoyenneté, a eu lieu. Il est relativement récent et est monté en puissance avec la préparation des élections législatives. Il est en réalité sous-tendu par deux autres débats, concernant la protection de l'emploi local et celle du foncier local. Nous sommes très jaloux de notre foncier car, contrairement à la Nouvelle-Calédonie, nous avons très peu de plaines. Nous n'avons pas de vastes surfaces, ce qui explique un attachement particulier, océanien, à la terre, même si nous vivons de la mer. Nous sommes issus de la terre, laquelle est étroitement liée à l'océan. Nous assistons aujourd'hui à une spéculation sur la vente des terrains en Polynésie française, sous l'effet d'investissements extérieurs. Lorsque la crise a eu lieu en Nouvelle-Calédonie, juste avant le référendum, certains Calédoniens ont souhaité investir ailleurs, en raison d'une incertitude quant au devenir de leur île.

Cela n'a pas été un raz-de-marée, mais un phénomène de spéculation a bel et bien existé, dans un mouvement de précipitation, presque de panique. Cela a fait flamber les prix. Le phénomène n'est pas dû seulement à la Nouvelle-Calédonie. Depuis un certain temps, la Polynésie française est devenue un havre de paix recherché, lorsqu'on atteint l'âge de la retraite et que l'on approche de la fin de sa vie, car la vie y est plus belle et plus douce.

Nous avons eu des gouvernements indépendantistes et Oscar Temaru avait fait une première tentative d'adoption d'une loi de pays qui permette de réserver les emplois locaux aux personnes originaires de notre territoire. Je crois qu'une condition avait été introduite à propos de la langue tahitienne : si l'on ne parlait pas le polynésien, on ne pouvait accéder à ces emplois. Le Conseil d'État a censuré cette disposition, ce que nous comprenons. Cela a découragé de nombreux acteurs. Nous avons repris le flambeau en conditionnant la prise d'un emploi local à un certain nombre d'années de résidence en Polynésie française.

Nous venons d'adopter la liste des emplois qui seraient ainsi réservés aux Polynésiens. Ces sujets créent une impatience, car le taux de chômage, en Polynésie française, est aujourd'hui élevé et de nombreuses personnes sont sans emploi. C'est ce contexte qui a sous-tendu le débat sur la notion de citoyenneté. Ce terme de citoyenneté me plaît peu, à vrai dire, car il donne le sentiment de vouloir écarter certains au profit des autres. C'est ce qui me fait peur. La Polynésie française est accueillante et cette notion va presque à l'encontre de notre façon de concevoir les choses. Le souci existe néanmoins et il faut que nous nous fassions accompagner par des spécialistes du Sénat ou de l'Assemblée nationale afin d'aboutir, sur le plan statutaire, à un dispositif qui soit à la mesure des spécificités locales.

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