Intervention de Ben Issa Ousseni

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 27 octobre 2022 : 1ère réunion
Évolution institutionnelle outre-mer — Audition de M. Ben Issa ousseni président du conseil départemental de mayotte

Ben Issa Ousseni, président du conseil départemental de Mayotte :

Comme je l'évoquais à l'instant, nous avons un vrai sujet avec l'immigration clandestine. Je veux insister sur cet aspect car le droit du sol, ainsi que le visa territorialisé, tels qu'ils sont utilisés aujourd'hui, bloquent totalement la situation à Mayotte. Par conséquent, un certain nombre d'étrangers régularisés et installés à Mayotte ne peuvent pas voyager et restent sur le territoire. Je ne demande pas forcément un changement du statut institutionnel de Mayotte ; cependant, j'estime que nous devrions être en capacité de pouvoir coopérer davantage avec nos voisins directs. Je pense notamment à Madagascar ou à la Tanzanie, avec qui nous entretenons des liens étroits. Or, aujourd'hui, nous ne pouvons pas signer de convention avec ces pays sans passer par Paris, ce qui complique la situation. Je suis convaincu que si nous possédions davantage de latitudes, cela permettrait d'améliorer la situation.

S'agissant de la question suivante : « Souhaiteriez-vous exercer des compétences dans de nouveaux domaines, notamment des compétences normatives ? À l'inverse, y a-t-il des compétences que vous souhaiteriez restituer à l'État, compte tenu soit de la difficulté à les exercer, soit du manque d'intérêt d'une gestion territoriale ? »

Comme je l'indiquais tout à l'heure, je souhaite, en premier lieu, que les compétences que nous sommes censés exercer puissent l'être pleinement avant d'en demander de nouvelles. J'insiste, aujourd'hui, très peu de choses ont été mises en place dans le cadre de notre compétence régionale que nous exerçons à 50 % à peine.

Vous me demandez si « nous souhaitons restituer des compétences à l'État ». Si les compensations sont effectuées correctement, nous ne sommes pas demandeurs de restituer des compétences. Aujourd'hui, cependant, en matière de continuité territoriale entre autres, alors que nous avons toutes les compétences, l'État ne nous accompagne pas, alors qu'il a le devoir de le faire. Par exemple, l'État assure la continuité territoriale entre la Corse et le continent, alors qu'à Mayotte, la liaison entre Petite-Terre et Grande-Terre est entièrement assumée par la collectivité territoriale, sans aucune participation de l'État. Nous nous sentons donc lésés. Je pourrais multiplier les exemples. L'électricité est gérée par EDF dans les autres territoires, alors que Mayotte évolue toujours dans un système local ; Air France ne dessert pas Mayotte, alors que la compagnie dessert tous les autres territoires. Une fois de plus, nous demandons que l'État assure la continuité territoriale de manière équitable et cohérente.

Je poursuis avec la quatrième question : « Quelle appréciation portez-vous sur la prise en compte des spécificités ou des souhaits des outre-mer lors de l'élaboration des lois et décrets ? Quelle méthode permettrait de l'améliorer ? »

Encore une fois, nous ne demandons pas forcément l'application de l'article 74 de la Constitution, et nous sommes satisfaits de l'article 73. Néanmoins, nous souhaitons que les textes puissent être adaptés à notre situation et au contexte local qui ne recouvrent pas forcément les mêmes réalités que dans l'Hexagone.

Ainsi, lorsque nous évoquons la présence de 8 000 à 10 000 mineurs isolés sur le territoire, ce chiffre n'est sans doute pas important dans l'Hexagone, mais à l'échelle de Mayotte, qui compte 299 000 habitants, cet effectif est extrêmement important. Le traitement de cette problématique ne peut donc pas être identique ici et dans l'Hexagone. Dans ce contexte, les décrets et lois doivent être adaptés.

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