Intervention de David Guyenne

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 1er décembre 2022 : 1ère réunion
Évolution institutionnelle outre-mer — Audition de représentants des bassins de l'océan indien et de l'océan pacifique de l'association des chambres de commerce et d'industrie d'outre-mer acciom

David Guyenne, président de la CCI de Nouvelle-Calédonie :

Vous nous interrogez sur l'avenir institutionnel des outre-mer, notamment sur la possibilité d'accorder davantage d'autonomie aux territoires ultramarins, soit en transférant de nouvelles compétences, soit en leur conférant des capacités supplémentaires d'adaptation réglementaire et normative, et sur l'impact de ces réformes sur nos économies.

Vous savez que la Nouvelle-Calédonie est engagée dans un processus de réforme institutionnelle, mais le monde économique et une grande partie de la société civile calédonienne considèrent que réformer pour donner davantage de pouvoirs aux institutions locales, sans une stratégie partagée de développement économique et humain, serait se tromper d'enjeu.

Dans le cadre du processus de sortie de l'Accord de Nouméa, l'État s'est engagé à faire un bilan des transferts de compétences en Nouvelle-Calédonie pour le début de l'année 2023. Le monde économique a réalisé un premier bilan en reprenant les 200 lois de pays votées en Nouvelle-Calédonie entre décembre 2006 et janvier 2022. 40 % sont des textes fiscaux et accroissent la fiscalité, 20 % sont relatifs au droit du travail, 10 % portent sur des aménagements de nature à faciliter le fonctionnement de la fonction publique, 6 % incluent de nouvelles dépenses sociales et leur financement, 5 % concernent des mesures de contrôle des marges, des prix et de l'économie. En excluant le droit des assurances, qui a surtout régulé les assurances décennales de construction, 80 % des textes n'ont pas servi à engager le territoire dans un développement économique ou à renforcer son attractivité, ni à répondre à une vision pour la Nouvelle-Calédonie.

Nous pouvons donc en conclure que l'Accord de Nouméa et le rééquilibrage qui a suivi n'avaient d'autre objectif que de trouver une paix politique. Or, pour le monde économique, la paix de demain doit être une paix sociale et climatique, apportée par une prospérité économique durable, soutenable et partagée.

Le monde économique calédonien s'est réuni en consortium pour peser dans le débat et faire en sorte que la réforme institutionnelle ait du sens. Il souhaite que les administrations soient au service d'un développement économique systémique, réfléchi, stratégique et concret.

Les fondamentaux régaliens, comme l'État de droit, la défense et la sécurité, l'éducation, la monnaie, etc., sont nécessaires au développement. Des piliers de développement co-construits et partagés doivent soutenir cette croissance calédonienne :

- la neutralité carbone en 2050, qui se décline en énergie verte, en compensation carbone et en nickel vert, et qui permet de développer une économie basée sur la lutte contre le réchauffement climatique dont la Nouvelle-Calédonie doit être le champion océanien et exporter son savoir-faire dans la région ;

- une autonomie agroalimentaire ;

- une économie des tribus ;

- un écotourisme ;

- une écoconstruction ;

- la construction de secteurs de l'énergie et de la maintenance, voire une économie autour de l'hydrogène.

Nous avons besoin de sujets concrets, qui permettent à la Nouvelle-Calédonie de tendre vers un système économique qui répond aux besoins économiques et sociétaux de demain.

Le monde économique demande que ce soit à l'aune de cette stratégie économique et sociétale que nos territoires réfléchissent à un statut.

La crise Covid et les défis climatiques qui vont rendre nos territoires ultramarins fragiles et vulnérables ont de fortes conséquences économiques ou sociales, comme l'accueil des réfugiés climatiques. Ils montrent que nos territoires ne pourront jamais se passer de la présence de l'État.

En matière de stratégie économique, sociétale et géopolitique, le monde économique calédonien demande le soutien de l'État en termes de cohérence, de planification, de compétences techniques, humaines, parfois financières pour que tous ensemble nous arrivions à rendre attractifs et prospères les territoires qui vont tous devoir affronter des mutations de modèle économique.

En réussissant, nos territoires contribuent à une présence européenne et française, impactante et utile dans nos environnements régionaux.

Nous proposons de vous transmettre les travaux de notre consortium citoyen et économique sur l'efficience institutionnelle que nous attendons et nos propositions d'alignement entre société civile, exécutifs locaux, État et l'organisation de nos interdépendances au service d'une vision économique et sociétale.

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