Intervention de Sophie Primas

Commission des affaires économiques — Réunion du 25 janvier 2023 à 9h00
Audition de Mme Laure de la Raudière présidente de l'autorité de régulation des communications électroniques des postes et de la distribution de la presse arcep

Photo de Sophie PrimasSophie Primas, présidente :

Nous avons le plaisir de recevoir Mme Laure de La Raudière, présidente depuis désormais deux ans de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). Madame la présidente, vous êtes accompagnée par M. Olivier Corolleur, directeur général adjoint, et par Mme Maya Bacache et M. Emmanuel Gabla, tous deux membres du collège de l'Arcep.

Madame la présidente, nous vous avions auditionnée pour la dernière fois le 20 janvier 2021, dans le cadre de la procédure de nomination prévue à l'article 13 de la Constitution. Si nous avons souhaité effectuer un premier bilan d'étape avec vous, c'est parce qu'en deux ans le contexte a changé dans les secteurs des postes et des télécommunications. Disons-le tout de suite : le contexte actuel n'est pas à l'apaisement, mais plutôt à l'agacement, à l'inquiétude et parfois à l'offensive.

Je pense premièrement à l'agacement des habitants et des élus, qui portent désormais plainte contre les opérateurs de télécommunications en raison des retards, des incidents et des dysfonctionnements répétés dans le déploiement de la fibre sur leur territoire.

Forcés de cadenasser des armoires de raccordement, de prendre des arrêtés contraignant les opérateurs à partager leur calendrier d'intervention et les techniciens à s'enregistrer au commissariat, voire de s'adresser directement à l'autorité que vous présidez, les élus sont devenus les régulateurs du quotidien d'un secteur qui, aux yeux de beaucoup, s'apparente aujourd'hui à un « Far West sans shérif ».

Face à cette situation, l'autorité que vous présidez a publié en novembre dernier un nouveau plan d'action pour améliorer la qualité de l'exploitation des réseaux en fibre optique, dont l'état en Île-de-France s'avère moins bon que dans les autres régions, selon la dernière analyse de terrain que vous avez menée. Quels sont les engagements pris par les opérateurs pour améliorer la qualité des raccordements à la fibre ? De quelle façon l'Arcep les contrôle-t-elle, et, le cas échéant, les met-elle en demeure de se conformer à leurs obligations et de respecter leurs nouveaux engagements ?

Alors que la demande de sanctions et de mesures fortes se fait de plus en plus pressante, vous défendez, madame la présidente, un modèle de régulation d'abord centré sur la concertation. Entre dialogue et sanction, comment trouver le bon équilibre, afin que l'Arcep exerce pleinement les fonctions qui lui sont attribuées par la loi ?

Je pense aussi à l'agacement des abonnés qui, en ce début d'année marquée par une inflation qui pourrait atteindre jusqu'à 7 %, voient le prix de leurs forfaits mobiles augmenter de quelques euros par mois. Certes, la France, grâce à une forte intensité concurrentielle, dispose des prix parmi les plus bas d'Europe : 15,70 euros par mois en moyenne pour un forfait mobile et 33,20 euros par mois en moyenne pour un abonnement internet fixe. Mais là aussi, lorsque les prix augmentent, que la qualité de service diminue et que les déceptions d'usage se font plus nombreuses, les attentes sont fortes vis-à-vis du régulateur.

À l'agacement s'ajoute aussi l'inquiétude des élus et des habitants concernés par la fermeture du réseau cuivre. D'ici à 2025, 670 000 foyers ne disposeront pas de la fibre optique en raison de la complexité de leur raccordement aux réseaux, alors même que l'Arcep a fixé un critère de 100 % de locaux raccordables à la fibre sur le territoire d'une commune pour pouvoir fermer le réseau cuivre, dont Orange est l'opérateur d'infrastructures unique et historique. Concrètement, qu'est-ce que cela signifie ? Est-ce que des personnes seront écartées de l'accès à la fibre ? Ou est-ce qu'Orange devra prolonger temporairement et localement l'accès à son réseau cuivre afin de respecter ce critère ?

À l'inquiétude s'ajoute enfin l'offensive, qui est d'abord celle des opérateurs. Lors de son audition remarquée devant notre commission, le 30 novembre dernier, Christel Heydemann, directrice générale d'Orange, a annoncé préparer de lourds contentieux contre l'Arcep à propos de l'encadrement contesté des tarifs de dégroupage : cette annonce très médiatisée témoigne des divisions qui agitent le secteur. Dans ce contexte, nous sommes impatients de bénéficier de vos éclairages : est-ce qu'une hausse des tarifs de dégroupage vous paraît justifiée ? Sinon, comment assurer une juste régulation du secteur des télécommunications, sans favoriser ou défavoriser un opérateur plutôt qu'un autre ?

J'en viens au dernier point. Depuis le 1er janvier 2023, La Poste commercialise un nouveau catalogue de services d'envois postaux, qui relèvent du service universel postal. Cette réforme se matérialise notamment par la suppression du timbre rouge et par l'optimisation, par expérimentation sur 68 sites, des tournées de distribution du courrier par les facteurs.

Nous auditionnerons prochainement le PDG de La Poste, mais je souhaiterais savoir si l'Arcep s'est prononcée sur cette réforme. En tant que présidente de l'autorité chargée de faire respecter les obligations de service public qui incombent à La Poste, pensez-vous que nous sommes en train d'assister à une réduction déguisée du service universel postal ? Ou s'agit-il plutôt de mesures d'optimisation rendues nécessaires par l'évolution des usages ?

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