Intervention de Henri Cabanel

Commission des affaires économiques — Réunion du 8 février 2023 à 9h00
Viande in vitro — Audition de Mm. Thierry Marx chef cuisinier étoilé étienne duthoit fondateur et directeur général de vital meat nicolas morin-forest cofondateur et président de gourmey et jean-françois hocquette directeur de recherche à l'institut national de recherche pour l'agriculture l'alimentation et l'environnement inrae

Photo de Henri CabanelHenri Cabanel, rapporteur :

Tout d'abord, je partage avec M. Rietmann une interrogation sur l'appellation de votre produit, qui suscite de nombreux débats - le chef Thierry Marx l'a indiqué. Il faut distinguer trois aspects.

Premièrement, nous banalisons par commodité de langage le terme générique « viande », mais ce terme peut être discuté : nous n'en sommes pas à reproduire des côtes de boeuf ou des pièces texturées avec des cellules musculaires, du gras, du sang et des tissus conjonctifs. Pour autant, les végétariens ne consommeraient pas de ce produit, qui reste d'origine animale.

Deuxièmement, il serait difficile de se passer du nom de l'espèce d'origine pour l'information du consommateur, notamment pour des raisons d'allergénicité.

Troisièmement, il faut prendre en compte la forme du produit : steaks, saucisses, carpaccio, lardons, etc. Cela nous renvoie au débat que nous avons eu pour les protéines végétales : l'utilisation de ces termes a été interdite par la loi pour des produits non animaux, mais le décret d'application a été suspendu pour des raisons de forme, et l'on peut aisément imaginer des contournements. Ces termes sont intéressants d'un point de vue commercial et pour favoriser l'acceptabilité par les consommateurs, mais ils sont aussi un frein pour l'acceptabilité sociétale des produits : le monde agricole se braque à cause de votre utilisation de ces termes. Pourrait-on envisager d'autres termes que celui de « viande » ? À quelle autre appellation commerciale pourrez-vous recourir ?

Par ailleurs, quels impacts cette technologie pourrait-elle avoir sur la concentration du marché de la viande ? M. Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, exprime des réserves car il ne veut pas de mastodonte de la viande. Si ces technologies se déployaient à grande échelle, ce secteur pourrait connaître une très forte concentration, alors que son amont était jusqu'alors plutôt décentralisé, du moins en France. Les géants européens et américains de la viande, comme Bell, Cargill, JBS ou Tyson, se positionnent en investisseurs. Dans le contexte de la mondialisation alimentaire, les conséquences peuvent être importantes tant chez nous qu'à l'autre bout du monde. Certaines entreprises comme Mosa Meat disent défendre un modèle décentralisé, mais il faut aller au-delà de la bonne volonté affichée des entreprises. Quels garde-fous peut-on envisager, par exemple en matière de propriété intellectuelle, pour limiter la concentration du secteur ? Par ailleurs, le coût de production de la viande in vitro pourrait-il vraiment baisser sans économies d'échelle ?

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