Je suis saisi par le propos : nous parlons de « viande », mais le sourcing de ces produits, tôt ou tard, finira par nous échapper. Dans ce mot, il y a un trompe-l'oeil, pour ne pas dire une tromperie : on va vers une industrialisation massive de l'alimentation, et donc vers un appauvrissement culturel très fort. Le foie gras a une histoire. Il y a quelques années, on a massifié sa production ; pour produire plus de revenus, le produit est devenu relativement banal, avec davantage d'industrialisation et un appauvrissement culturel. C'est ce qui m'inquiète : cet appauvrissement peut ne plus permettre de revenir à l'idée gastronomique de l'assiette, plaisir, bien-être, santé.
J'entends les enjeux ; il ne faut pas que la France soit à la traîne. Mais la France n'a plus le pouvoir de dire stop, on ne veut pas de ce produit chez nous. Cela me gêne, en tant qu'artisan. En tant que chercheur, j'écoute le propos, mais je n'arrive pas à déconnecter cela de la massification de l'industrialisation de notre nourriture, de la mondialisation et de l'appauvrissement culturel. On ramène tout sur la consommation et sur le prix, et plus assez sur la culture. Savoir manger, c'est savoir être, redonner du sens à son alimentation. Se restaurer a du sens en matière de lien social. Sinon, on peut aussi se nourrir par perfusion comme à la Pitié-Salpêtrière !