Intervention de Hervé Berville

Commission des affaires européennes — Réunion du 2 février 2023 à 8h35
Agriculture et pêche — Audition de M. Hervé Berville secrétaire d'état chargé de la mer

Hervé Berville, secrétaire d'État :

Madame Lavarde, les questions posées par vos collègues portaient plus sur les initiatives françaises, mais, en effet, nous ne pourrons pas résoudre les problèmes sans coopération internationale. La France porte à l'échelon international, auprès de l'Organisation maritime internationale, la préoccupation des pertes de conteneurs et nous nous coordonnons avec d'autres pays pour réduire les émissions du secteur.

En Méditerranée, nous avons créé une zone de maîtrise des émissions de soufre (Sulphur Emission Control Area, ou Seca). La France et l'Espagne ont signé le traité de Barcelone qui inclut l'enjeu de la protection de la Méditerranée et toutes nos actions se font avec les pays du pourtour méditerranéen, pour lutter contre la pollution et réduire la vitesse des navires, afin de diminuer les risques de collision avec les cétacés. Nous avons également créé une zone de maîtrise des émissions d'azote (Neca). Toute cette action en Méditerranée se fait avec l'Italie, l'Espagne et les pays du Maghreb.

Sur le dumping social, je me suis rendu à Madrid en novembre pour convaincre nos amis espagnols de nous rejoindre dans ce combat, car ils constatent aussi des pratiques dommageables sur leurs côtes. Mon homologue italien et moi travaillons à la décarbonation du transport maritime. Sur la pluriannualité des quotas, nous travaillons aussi avec d'autres pays. Toute l'action maritime s'inscrit dans un cadre de coopération.

J'en viens à l'interdiction de l'exploitation minière des fonds marins. Le Président de la République a pris cette décision à la COP27 de Charm el-Cheikh. C'est une décision historique et courageuse, car la France ne se contente pas d'un moratoire, elle interdit l'exploitation minière dans les fonds marins français et va se battre pour généraliser cette position. Tout le monde a conscience que les océans sont fragiles et cruciaux pour la régulation du climat, et qu'ils recèlent une biodiversité à préserver.

Le Gouvernement était donc très favorable à la résolution de l'Assemblée nationale, puisque le Président de la République avait souhaité cette interdiction trois mois plus tôt. J'avais moi-même expliqué au Sénat notre position sur le sujet et mis fin au financement d'un démonstrateur d'exploitation minière des fonds marins, afin d'orienter notre activité vers l'exploration scientifique. Nous déployons donc, dans le cadre de France 2030, un plan de 350 millions d'euros pour la recherche scientifique sur les fonds marins.

Côté politique, nous nous tournons maintenant vers nos partenaires européens afin de leur expliquer que c'est la voie à suivre pour faire face aux enjeux qui sont devant nous, d'autant que les métaux des fonds marins ne sont pas nécessaires pour la transition énergétique, comme le montre le rapport de WWF. D'ailleurs, des entreprises comme BMW se sont déjà engagées à ne pas utiliser les métaux issus des fonds marins. À la COP15, j'ai plaidé pour inclure dans la décision finale des éléments sur l'exploitation minière des fonds marins. Ainsi, pour la première fois, il est précisé qu'il faut faire preuve de précaution dans l'exploitation des fonds marins. C'est moins ambitieux que ce que nous souhaitions, mais c'est inédit. Je continuerai ce travail, notamment à New York à la fin du mois de février concernant le traité sur la haute mer en négociation.

Côté juridique, nous menons un travail avec l'Allemagne afin de définir les outils les plus adaptés pour empêcher l'émission de licences permettant l'exploitation des fonds marins. J'ai rédigé une tribune commune avec mon homologue sur ce sujet.

Enfin, nous menons un travail au sein de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM) pour que cette instance, créée dans les années 1990, réoriente son mandat vers la protection de la biodiversité, la connaissance, la recherche.

Au sujet des dauphins, la France a été condamnée par l'Union européenne en raison des captures accidentelles de cétacés. Nous avons donc mis en place un plan d'urgence ambitieux, qui repose sur plusieurs éléments. Le premier est un équipement obligatoire de localisation, d'effarouchement et de caméras vidéo. Ensuite, nous avons identifié les 213 navires les plus actifs et le nombre de navires équipés d'une caméra doit passer de 20 à 100. Les délais sont tenus, les marchés sont en cours. Nous travaillons avec les scientifiques et l'Office français de la biodiversité pour tirer les conséquences de ce plan et avoir des données scientifiques. La profession s'est saisie du sujet et Bérangère Couillard et moi-même y travaillons.

Sur les conteneurs, l'objectif du précédent quinquennat était de porter de 60 % à 80 % la part des grands ports maritimes français dans le traitement du trafic maritime de marchandises. Vous posez une question de souveraineté, de maîtrise des flux, de formation des agents, de recrutement dans la filière. Nous déploierons une stratégie pour développer les porte-conteneurs français. Les investissements à faire sur les grands ports d'État sont massifs. Nous souhaitons réduire notre dépendance par rapport aux ports du nord de l'Europe, Anvers Rotterdam et d'autres. Clément Beaune et moi y travaillons, en lien avec les territoires, car les régions et les départements veulent participer au développement de l'économie maritime.

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