Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la voiture de demain sera électrique.
Les voitures électriques tiennent une place de plus en plus significative dans les ventes de voitures neuves de l’Union européenne : 1, 1 million de véhicules électriques ont ainsi été vendus en 2022, soit 28 % de plus que l’année précédente.
Selon les chiffres publiés par l’Association des constructeurs européens d’automobiles, elles représentent au total 12, 1 % des voitures neuves vendues en 2022, contre 9, 1 % en 2021 et 1, 9 % en 2019. En France, cette proportion est même plus élevée, puisque 13, 3 % des véhicules vendus étaient entièrement électriques en 2022 – soit 200 000 sur 1, 5 million.
Au-delà des chiffres, je profite de ce débat pour porter trois messages clés sur le développement du véhicule électrique en France.
Le premier est que la voiture électrique est indispensable, essentielle pour décarboner notre secteur des transports.
Dans son dernier rapport, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) alerte sur l’urgence climatique. Il reste quelques années, comme vous le savez, pour agir et éviter les conséquences les plus dramatiques d’un changement climatique non maîtrisé pour les générations futures. Les années qui sont devant nous seront décisives : il nous faudra déployer des solutions nous permettant de contenir ce réchauffement en deçà des 2 degrés Celsius.
Le véhicule électrique, en tant que solution d’ores et déjà disponible et mature, fait partie des leviers absolument indispensables. D’après le Giec, les véhicules électriques alimentés par de l’électricité à faibles émissions offrent le plus grand potentiel de décarbonation pour le transport terrestre.
Les émissions dans le secteur des transports, qui pèsent pour 25 % du total des émissions en Europe et pour 30 % des émissions en France, ne baissent pas, voire continuent de s’accroître : on constate en effet qu’elles ont augmenté de 12 % entre 1990 et 2015. Sont en cause la dépendance aux carburants fossiles, le maintien d’un niveau élevé d’émissions de CO2 par véhicule ainsi que la croissance des trafics.
La fin des voitures thermiques et la conversion à l’électrique sont donc des leviers absolument essentiels, une étape sur le chemin d’une mobilité décarbonée. La décision d’interdire la commercialisation des véhicules thermiques à compter de 2035 en Europe a le mérite de la clarté.
Une voiture électrique achetée en 2022 et roulant en France émet cinq fois moins de CO2 que son homologue à essence, grâce à une électricité produite essentiellement à partir d’énergie nucléaire, mais aussi d’énergies renouvelables, sources d’énergie bas-carbone. Ailleurs en Europe, c’est en moyenne trois fois moins.
D’ici à 2030, l’empreinte carbone des véhicules électriques est amenée à se réduire encore davantage grâce à une électricité de plus en plus souvent produite à partir d’énergies bas-carbone et en raison de l’amélioration de la performance environnementale des batteries.
Le deuxième message que je souhaite vous adresser est que le Gouvernement travaille à bâtir une filière industrielle complète pour les véhicules électriques. Cette décarbonation, vous l’avez indiqué, monsieur le sénateur Babary, ne doit pas se faire au détriment de l’industrie française – c’est une évidence.
Il faut que la France prenne sa part dans le renouvellement du parc automobile français. On ne peut importer massivement des véhicules électriques fabriqués dans d’autres pays.
Le Président de la République l’a encore rappelé lors du Mondial de l’Auto, en octobre dernier. Nous avons une stratégie claire pour faire de la France une grande nation de véhicules électriques et pour maintenir une industrie automobile forte et souveraine dans notre pays.
Nous voulons qu’en 2030 2 millions de véhicules électriques, ainsi que les composantes stratégiques de leur chaîne de valeur, que sont les batteries électroniques, les logiciels et les bornes de recharge, soient produits chaque année en France.
Nous devons réussir à maîtriser les technologies de pointe, qui vont des moteurs électriques jusqu’aux batteries, en passant par les composants de l’électronique de puissance et les systèmes qui serviront aux véhicules automatisés.
Par ailleurs, le maintien de la localisation sur le territoire national des usines d’assemblage de véhicules est absolument primordial pour notre filière automobile d’excellence et pour tous ceux qui y contribuent. Lors du Mondial de l’Auto, les constructeurs Renault et Stellantis ont ainsi annoncé la production de quinze nouveaux modèles de véhicules électriques dans leurs usines françaises.
L’État met des moyens sans précédent pour atteindre cet objectif d’une production annuelle de 2 millions de véhicules électriques à l’horizon de 2030.
Nous mobilisons ainsi, via le plan France 2030, pas moins de 5 milliards d’euros pour l’ensemble de la filière automobile, à la fois pour soutenir la recherche et le développement et pour favoriser l’industrialisation des véhicules et de leurs composants en France.
Mon troisième et dernier message concerne les conséquences industrielles et sociales de l’arrêt de la commercialisation des véhicules thermiques en 2035. Le Gouvernement reste très vigilant sur ce point, car il s’agit d’un tournant majeur pour la filière automobile.
La décarbonation du parc automobile va dans le sens de l’histoire et nous sommes évidemment prêts à soutenir tous les acteurs dans cette mutation industrielle. Il est indispensable d’accompagner nos entreprises, de former les salariés, pour faire face à cette révolution et faire en sorte que la France garde une industrie automobile performante et souveraine.
Plusieurs activités en lien avec la production de véhicules thermiques vont naturellement décroître. Je pense notamment aux conséquences majeures de cette évolution sur certaines filières de sous-traitance. Le décolletage, la fonderie de fonte, la forge figurent parmi les activités qui seront confrontées à des baisses de commandes dans les prochaines années.
L’État accompagne d’ores et déjà les entreprises de ces secteurs dans leurs projets de diversification, qu’elles s’orientent vers la fabrication de véhicules électriques ou qu’elles sortent de la filière automobile ; des reconversions sont en effet possibles dans d’autres domaines.
Outre les entreprises, ce sont aussi nos territoires qu’il faut accompagner dans l’évolution du tissu industriel. C’est la raison pour laquelle l’État a lancé, en lien avec la Banque des territoires, l’appel à manifestation d’intérêt « Rebond industriel » dans le cadre du programme Territoires d’industrie.
Nous consacrons une enveloppe de 100 millions d’euros aux territoires touchés par les mutations du secteur automobile : il s’agit d’identifier des projets industriels dans les bassins d’emplois affectés et de garantir à chaque salarié de l’industrie automobile des perspectives d’emploi dans son bassin de vie ainsi que dans les secteurs d’avenir.
Vous le constatez, mesdames, messieurs les sénateurs, l’État est conscient de la révolution que nous avons à engager ensemble et met tout en œuvre pour accompagner la filière automobile dans cet effort de décarbonation absolument stratégique.
Bien sûr, l’objectif est ambitieux, mais il n’est plus temps de tergiverser, car les décisions des entreprises en matière d’investissement se prennent aujourd’hui. Ces dernières doivent désormais clairement s’orienter vers l’électrification de notre parc automobile.
Nous aurons bien évidemment le loisir d’en discuter lors de ce débat, au cours duquel je répondrai avec la plus grande clarté possible.