Intervention de Hervé Gillé

Réunion du 7 février 2023 à 14h30
Production d'énergies renouvelables — Vote sur l'ensemble

Photo de Hervé GilléHervé Gillé :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’engagent depuis plusieurs années sur l’urgence à passer d’une écologie de principe à une écologie d’action. Avec ce texte, nous touchons du bout des doigts notre objectif. Une majorité parvient enfin à se réunir derrière une volonté commune : l’accélération du déploiement des énergies renouvelables.

Cela étant, nous continuons à nous interroger sur le calendrier : le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables et nucléaires précède une loi de programmation sur l’énergie et le climat qui cristallisera le choix de notre mix énergétique. Bref, nous mettons la charrue avant les bœufs !

Pour autant, la France ayant été le seul pays de l’Union européenne à avoir manqué son objectif de production des énergies renouvelables en 2020, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a agi en responsabilité pour améliorer autant que possible ce texte nécessaire, afin de trouver une issue favorable.

Le projet de loi conserve l’objectif initial d’accélération des énergies renouvelables tout en tenant compte du rôle central des collectivités territoriales et de la nécessaire préservation de la biodiversité.

En effet, plusieurs améliorations sont notables.

En premier lieu, la commission mixte paritaire est revenue sur la rédaction de l’article 4 en réintroduisant le fait que les projets d’EnR, qui pourront bénéficier de manière automatique de la raison impérative d’intérêt public majeur, devront répondre à des conditions définies par décret en Conseil d’État. Nous considérons cela comme une mesure de protection.

En second lieu, la commission mixte paritaire supprime la modification de la répartition de la taxe sur l’éolien en mer entre les communes sur la base de leur population dite dotation globale de fonctionnement (DGF), c’est-à-dire en majorant la population d’un habitant par résidence secondaire. C’était déstabilisant pour certaines communes situées en zone littorale.

J’en viens à la question de l’accélération du développement de l’énergie solaire, thermique et photovoltaïque. Depuis le début de l’examen de ce texte, notre groupe a privilégié le développement d’énergie solaire sur le bâti existant plutôt qu’une augmentation de l’artificialisation. Le texte va au-delà de ce qui était initialement contenu dans le projet de loi. C’est un grand pas.

Nous avons défendu un encadrement des nouvelles dérogations à la loi Littoral et à la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, dite loi Montagne, pour éviter une accentuation du mitage des territoires avec un risque accru de rejet par les habitants des projets sur ces espaces protégés.

Aussi, le compromis trouvé en commission mixte paritaire, visant à recueillir l’avis des associations représentatives des collectivités territoriales concernées, à savoir l’Association nationale des élus du littoral (Anel) ou l’Association nationale des élus de la montagne (Anem), est satisfaisant.

Nous avons été très attentifs au processus de planification partant des communes qui a été entériné ; nous en prenons maintenant acte. Il se concrétise par la définition de zones d’accélération pour l’implantation d’énergies renouvelables. Il a également été précisé que les communes ne pourront définir des zones d’exclusion des énergies renouvelables qu’une fois les zones d’accélération elles-mêmes définies et suffisamment nombreuses pour que les objectifs de la PPE puissent être atteints. Cette mesure de bon sens évitera des veto arbitraires, qui étaient d’ailleurs rejetés par les associations d’élus locaux.

Néanmoins, le processus de planification n’est pas suffisamment abouti. Certes, les schémas de cohérence territoriale (Scot), les plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi) seront consultés. Mais l’approche territoriale permettrait une meilleure acceptabilité des mix énergétiques et une meilleure répartition de la valeur. Nous restons dans un entre-deux plus politique que stratégique.

Nous avons débattu de l’avis conforme ou de l’avis simple à obtenir des architectes des Bâtiments de France. Le consensus trouvé en commission mixte paritaire illustre surtout le manque de moyens alloués aux services pour accompagner au mieux l’implantation des projets en fonction de la réalité du terrain.

Dans ce texte final, d’autres résultats sont plus contrastés. Sur l’agrivoltaïsme, nous avons défendu avec constance la nature première du foncier agricole : la production alimentaire. Notre devoir est de protéger les agriculteurs et de lutter contre les effets d’aubaine visant à transformer notre modèle agricole en de vastes champs de panneaux photovoltaïques. La plupart des arbitrages se décideront par décrets, et nous serons attentifs à leur mise en œuvre. Néanmoins, la recherche d’un modèle économique et environnemental agricole mérite d’être retravaillée.

Pour terminer, nous déplorons la suppression de la disposition introduite par l’Assemblée nationale qui permettait d’interdire aux producteurs de suspendre sur leur propre initiative leur contrat de complément de rémunération avant son terme, pour profiter seuls, au détriment de la collectivité, de l’envolée des prix de l’énergie et donc des surplus de revenus à engranger. Ce processus rend l’État systématiquement perdant en le privant de recettes.

À l’issue de nos débats, ce texte va dans le bon sens, même si des interrogations demeurent sur la mise en œuvre des mesures, mais aussi sur les arbitrages qui seront décidés par décret. De plus, il demeure insuffisant, voire trop complexe, sur le plan de la planification territoriale.

L’accélération des énergies renouvelables ne pourra se faire que dans le cadre de projets de territoires cohérents…

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