Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, tout avait très bien commencé !
Tout d’abord, sur le principe, sept ans après la promulgation de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de Ségolène Royal, l’État et le Gouvernement proposaient au Parlement une loi consacrée au développement des énergies renouvelables, permettant enfin à la France de tenter de crédibiliser un scénario, à l’horizon de 2035, de réduction de la part du nucléaire sous la barre des 50 %, scénario affiché, mais jamais décliné en politiques opérationnelles.
Tout s’était bien poursuivi ! Évidemment, il reste au Sénat une certaine nostalgie des années Pompidou, d’un Hexagone centralisé et un peu refermé sur lui-même, où nos centrales nucléaires suffisaient presque, avec les barrages, à assurer nos besoins électriques, et seulement électriques.
Comme on pouvait un peu s’y attendre, l’offensive a donc bien eu lieu, mais a échoué, fauchée par quelques pales d’éoliennes honnies. Il s’est ainsi trouvé au Sénat une majorité claire pour refuser les deux mesures qui auraient tronçonné les mâts desdites éoliennes. Le Sénat a ainsi refusé l’éloignement des parcs éoliens en mer à 40 kilomètres des côtes et rejeté l’instauration d’un droit de veto des maires sur les implantations, une responsabilité dont – je le rappelle – ceux-ci n’étaient pas demandeurs !
Mieux, et parfois à notre plus grande surprise, plusieurs amendements importants du groupe écologiste ont été adoptés sur la planification régionale, l’alourdissement des pénalités pour défaut d’équipement en panneaux photovoltaïques et la création d’un fonds dédié à la biodiversité. À cet égard, je tiens à remercier les deux rapporteurs de leur travail et des nombreux avis favorables qu’ils ont émis sur nos amendements.
Fort de ces avancées, le groupe écologiste avait très logiquement voté en faveur du texte amendé par le Sénat.
Mais, depuis lors, les choses se sont assombries. Un certain nombre de mesures, à notre avis importantes, ont été modifiées ou ont disparu purement et simplement du texte dans le cadre de l’examen du texte par l’Assemblée nationale. Je pense notamment au niveau de pénalisation très insuffisant en cas de manquement aux obligations d’équiper les parkings en panneaux photovoltaïques. C’est dommage, car cela se traduira par un équipement et une production moindres. Je pense également à l’affaiblissement des mesures sur l’autoconsommation, pourtant demandées dans de nombreux territoires. Et ma liste n’est pas exhaustive !
Sur le fameux article 3, qui marquait la volonté unanime du Sénat de mieux associer les élus locaux, la solution trouvée, visant à équilibrer zones d’accélération et zones d’exclusion, les deux allant de pair, pouvait paraître séduisante. Le slogan que vous avez lancé tout à l’heure est d’ailleurs percutant, madame la ministre.
Toutefois, l’avis conforme des maires sur deux des étapes qui émaillent ce processus risque de le rendre finalement bloquant et ralentissant. C’est ce que craignent aujourd’hui de nombreux professionnels du secteur.
Il ne s’agit pas pour autant d’ignorer les avancées de ce texte. L’évolution des procédures pour l’éolien en mer va permettre de gagner un temps significatif dans l’instruction des dossiers, et l’ouverture des contrats de long terme aux collectivités est importante pour mobiliser l’épargne locale. Enfin – nous y étions attachés –, la création d’un fonds pour la biodiversité dans le cadre d’une loi sur l’énergie constitue également, en dépit de montants rabotés en commission mixte paritaire, une évolution importante, puisqu’elle permet d’élargir pour la première fois à l’énergie, et non plus seulement à l’eau, l’assise d’un financement pérenne pour la biodiversité. Madame la ministre, le gecko vert de Manapany vous remercie sincèrement de votre attention.
Il y a donc des « plus » et des « moins » ! Surtout, à l’horizon, le retour du nucléaire, au sujet duquel le Président de la République et le Gouvernement multiplient les signaux, parallèlement à la discussion de ce projet de loi.
Il ne vous aura évidemment pas échappé, madame la ministre, que l’avis des filières productrices d’énergies renouvelables est très mesuré quant à l’impact de cette loi, notamment s’agissant de l’agrivoltaïsme ou de l’éolien terrestre.
Aussi, dans ce contexte, le vote du groupe écologiste du Sénat sera, lui aussi, mesuré. Nous nous abstiendrons sur ce texte, qui ne suffira pas – c’est une évidence – à faire en sorte que la France respecte les objectifs de développement des énergies renouvelables fixés par l’Union européenne.