Intervention de Florence Blatrix Contat

Réunion du 7 février 2023 à 14h30
Commerce extérieur : l'urgence d'une stratégie publique pour nos entreprises — Débat sur les conclusions d'un rapport d'information de la délégation sénatoriale aux entreprises

Photo de Florence Blatrix ContatFlorence Blatrix Contat :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cela a été dit, la balance commerciale de la France est en déficit chronique depuis 2002, et le déficit est devenu abyssal ces dernières années. Pis, au sein de l’Union européenne, la France se classe en queue de peloton, puisque notre pays avait le déficit le plus élevé en 2021.

La délégation sénatoriale aux entreprises a, dans son rapport, tenté d’éclaircir le sujet et d’avancer ses propositions. Je remercie le président Babary de nous permettre de débattre ce soir de ce rapport ô combien stratégique pour notre économie.

Je voudrais m’attacher maintenant, au nom des sénateurs socialistes, écologistes et républicains, à souligner quelques aspects qui nous semblent particulièrement importants.

Cela a été dit, la dégradation des performances de notre commerce extérieur est le fruit de la désindustrialisation de notre pays. En attestent les données récentes, citées par notre collègue Marie-Noëlle Lienemann, sur la part de l’industrie manufacturière dans le PIB, qui est passée sous la barre des 10 % – 9 % exactement –, nous reléguant là aussi dans les tréfonds du classement européen.

Je n’aurai pas une vision aussi optimiste de notre commerce extérieur que l’orateur précédent, car certains points sont très négatifs.

Ainsi, l’industrie automobile était excédentaire au début des années 2000 ; aujourd’hui, le déficit de ce secteur s’élève à 18 milliards d’euros. Pour les autres biens industriels, le déficit était d’une dizaine de milliards d’euros au début des années 2000 ; il était de 66 milliards d’euros l’an dernier. L’aéronautique, quant à elle, n’a pas retrouvé sa dynamique d’avant-crise. Seul le secteur du luxe et des cosmétiques semble progresser. C’est vraiment inquiétant !

On peut toutefois se rassurer en évoquant la balance des services, qui est excédentaire. Mais elle ne parvient pas à combler le déficit grandissant de la balance des biens.

Nous pouvons craindre pour l’avenir : si la production de biens a été délocalisée, celle de certains services pourrait également l’être demain. En effet, le rapport montre que les exportations de biens et de services sont intimement liées.

Face à cette dégradation continue, il faut réagir en se fondant sur une analyse stratégique sérieuse, comme plusieurs collègues l’ont dit.

Il faut interroger nos choix de spécialisations, analyser nos avantages comparatifs et, dans un environnement certes incertain, construire des avantages comparatifs porteurs pour l’avenir.

Nos collègues de la commission des affaires économiques ont déterminé les cinq plans principaux pour reconstruire la souveraineté économique de la France et de l’Europe. Il faut approfondir cette piste et la mettre en œuvre.

Une vision stratégique de moyen terme doit donc être construite : si la compétitivité prix n’est pas à négliger, il faut prendre en compte également la compétitivité hors prix, notamment l’innovation et le capital humain.

La recherche constante de l’innovation, tant dans les produits que dans les processus, est une dimension essentielle de la compétitivité. Le tournant des transitions numérique et écologique doit être pris.

En effet, à l’heure où le changement climatique et la transition énergétique qu’il implique percutent nos cadres traditionnels de pensée et notre système productif, une seconde transformation est à l’œuvre : la numérisation et la digitalisation.

Ces transitions écologique et numérique auront un impact sur les formes des échanges économiques et sur la mondialisation.

C’est dans ce nouveau contexte global qu’il nous faut désormais penser le commerce extérieur. Ces éléments doivent devenir, demain, les leviers de la compétitivité de l’économie française et européenne.

Monsieur le ministre, les services ministériels travaillent-ils sur une feuille de route, géographique et sectorielle, pour anticiper ce que seront demain les échanges économiques mondiaux, donc notre commerce extérieur, alors que, et ce point a été peu soulevé dans le débat, on envisage, partout et dans de nombreux domaines, des circuits courts et des relocalisations ?

Bref, quel commerce extérieur envisager dans ce cadre ? Comment construire de nouveaux avantages comparatifs alliant compétitivité et ambition climatique ?

En ce qui concerne l’accompagnement des entreprises, un récent rapport de la Cour des comptes a montré les limites de la stratégie de Business France. Comment faire évoluer les actions de cette structure ?

Enfin, comment envisagez-vous la place de nos PME et ETI dans la nouvelle donne du commerce mondial ?

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