Intervention de Serge Merillou

Réunion du 15 février 2023 à 15h00
Approvisionnement en produits de grande consommation — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Serge MerillouSerge Merillou :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la situation de l’agriculture française ne cesse de se dégrader ! Trop nombreux sont les agriculteurs qui ne parviennent pas à se payer décemment.

Cette proposition de loi s’éloigne toutefois de notre cœur de cible issu de l’esprit des lois Égalim, à savoir garantir la juste rémunération des agriculteurs. Ce texte se concentre sur les relations entre les distributeurs et les fournisseurs. On peut donc légitimement s’interroger sur les conséquences pour les agriculteurs, qui sont en amont de la chaîne.

Je crains que cette proposition de loi ne soit un énième essai, une nouvelle tentative face à l’inefficience des lois Égalim successives, en attendant une grande loi agricole censée, nous l’espérons, traiter les problématiques de fond.

Pour l’heure, les dispositifs adoptés ces dernières années ont abouti à des échecs. Les auteurs de ce texte, issus de la majorité présidentielle, font le constat que la crise ukrainienne et la covid-19 ont rendu impossible l’atteinte des objectifs contenus dans les deux premières lois.

Il faut l’admettre, ces événements n’ont pas aidé… Mais la conjoncture n’est pas la seule responsable de ce manque de résultats. Le groupe socialiste avait alerté le Gouvernement sur le manque d’ambition de ces textes au vu de la gravité de la situation de notre agriculture.

Notre priorité doit être de consolider notre modèle agricole, ainsi que les maillons qui constituent la chaîne de transformation et de distribution.

Redevenir une véritable puissance agricole, assurer à nos concitoyens une alimentation française de qualité, garantir notre souveraineté alimentaire : ces objectifs, nous les approuvons sur de nombreuses travées. Les atteindre n’est possible que grâce à un juste partage de la valeur.

Agriculteurs, transformateurs, distributeurs, tous doivent trouver leur compte dans les négociations commerciales. Pour ce faire, notre rôle de législateurs est de veiller à une régulation et à une transparence totale de ces dernières. En cela, je salue l’article 1er, qui vise à lutter contre les stratégies de contournement du droit par la grande distribution, laquelle constitue des centrales d’achat à l’étranger pour ne pas être soumise aux règles encadrant les négociations commerciales telles que les ont fixées les lois Égalim.

Comme l’a affirmé mon collègue député Gérard Leseul, notre rôle est de « corriger les dispositifs au fur et à mesure pour apporter un cadre qui permet de rééquilibrer ce qui est déséquilibré ».

En ce sens, mon groupe et moi-même sommes opposés aux intentions initiales de Mme la rapporteure à l’article 2. Bien que sceptiques sur les retombées concrètes du dispositif SRP+10 pour les revenus des producteurs, nous considérons qu’une suppression pure et simple sans autre option n’est ni une solution opportune ni un bon signal donné aux acteurs de la négociation.

Mes chers collègues, parce qu’elles sont, selon nous, un levier pertinent pour mieux rémunérer les agriculteurs dans les filières en difficulté, nous proposons de pérenniser les conventions interprofessionnelles alimentaires territoriales qui lient une coopérative ou une organisation de producteurs, un ou plusieurs transformateurs et un distributeur. Elles sont une alternative intéressante dans les filières peu allantes sur la contractualisation individuelle.

Nous défendrons donc un amendement visant à revenir à la rédaction votée à l’Assemblée nationale, sur la proposition de nos collègues socialistes.

En outre, nous proposons de rétablir le montant des taux de service mensuel pouvant donner lieu à des pénalités, mais à hauteur de 97 %.

Mes chers collègues, la discussion de ce texte est l’occasion de remettre l’agriculture au cœur du débat public. Notre modèle agricole est en grande difficulté. La concurrence, l’absence de clauses miroirs, le manque d’attractivité du secteur sont d’autant de facteurs qui plombent notre agriculture. Pourtant, les enjeux auxquels nous faisons face nous imposent de trouver des solutions rapides et efficaces qui permettent à la France de se doter d’un modèle agricole efficient:

Cette proposition de loi n’est qu’une goutte d’eau. Elle doit s’inscrire dans une réflexion plus large, une réforme globale de notre modèle agricole. Je souhaite qu’un texte permette un rééquilibrage des relations entre industriels et distributeurs et qu’il ait, par ruissellement, des répercussions sur les producteurs.

Après l’annonce par le Gouvernement d’une grande loi agricole dans les prochains mois, nous aurons, j’en suis convaincu, l’occasion de défendre la juste rémunération des agriculteurs.

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