Intervention de Éric Gold

Réunion du 16 février 2023 à 10h30
Aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Éric GoldÉric Gold :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, quatre mois après l’adoption de cette proposition de loi à l’unanimité, nous nous retrouvons pour examiner le texte en deuxième lecture, après son adoption à l’Assemblée nationale – à l’unanimité également, mais avec plusieurs modifications. Si celles-ci ont fait craindre un report dans l’application de la mesure, elles ont néanmoins permis d’améliorer le texte, notamment grâce à l’engagement du Gouvernement, sorti de sa réserve initiale.

Sur un sujet aussi majeur que les violences conjugales, nous pouvons saluer le travail consensuel accompli au sein du Parlement et de l’exécutif. Quand il s’agit d’aider les victimes à s’extirper des mains de leur bourreau, nous sommes heureusement capables de travailler en bonne intelligence.

Près de 300 000 personnes sont victimes chaque année de violences conjugales en France et 72 % d’entre elles sont des femmes. Or il est établi que la précarité financière retarde, voire empêche le départ du domicile conjugal. On le sait, cette précarité touche davantage les femmes. En complément des aides déjà existantes – téléphone grave danger, bracelet anti-rapprochement et toutes les mesures du Grenelle des violences conjugales –, cette proposition de loi s’attaque donc spécifiquement à la question de la dépendance financière, qui demeure un frein majeur pour nombre de victimes.

Conservant l’esprit initial du texte, le dispositif adopté par l’Assemblée nationale se décline en un prêt à taux zéro et une aide non remboursable, modulés en fonction des besoins de la victime et de sa situation économique et sociale. La présence d’enfants à charge pourra notamment permettre l’octroi d’un montant supplémentaire, qui devrait aider à les sortir de ce climat de violences dont ils sont aussi les victimes.

Dans le cas d’un prêt, sur décision de justice, le remboursement pourra être mis à la charge de l’auteur des violences, ce qui libérera de fait la victime de sa créance.

Cette aide est toutefois conditionnée à un dépôt de plainte ou à un signalement au procureur de la République. Les commissariats et les unités de gendarmerie pourront enregistrer et transmettre la demande d’aide, sans y être obligés. Seule demeure l’obligation d’informer la victime de l’existence de cette aide, ce qui semble, en effet, plus conforme aux rôles et aux missions des forces de l’ordre.

Hormis les articles qui sollicitent des demandes de rapport, auxquelles nous sommes généralement, au Sénat et au groupe du RDSE, très réticents, nous regrettons l’inscription d’une demande de loi de programmation pluriannuelle sur la trajectoire des finances publiques en matière de lutte contre les violences faites aux femmes. Cela n’a qu’une portée symbolique, puisque le Gouvernement n’est pas tenu de déposer un tel projet de loi. Gardons-nous de créer de faux espoirs en la matière.

Enfin, si la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale correspond à la volonté générale des auteurs de la proposition de loi de créer une aide universelle, la suppression de la condition de régularité de séjour et de stabilité de résidence en France me paraît en réalité peu opérationnelle. Chaque victime doit bien sûr pouvoir être aidée, mais je doute que les personnes en situation irrégulière se rendent au commissariat pour porter plainte – je crois que nous devrions nous concentrer sur des aides plus adaptées à leur réalité.

Pour conclure, cette proposition de loi offre une aide supplémentaire dans cette période de latence que constitue le départ – parfois brutal – du domicile pour répondre au sujet très complexe de la dépendance financière, qui ajoute à la vulnérabilité et repousse l’indispensable mise à l’abri. Si ce nouveau droit peut convaincre ne serait-ce qu’une seule victime de partir, peut-être aurons-nous sauvé une vie de plus. Le groupe du RDSE votera donc, comme en première lecture, cette proposition de loi d’une seule voix.

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