Les sujets abordés dans la PPL ne sont pas seulement techniques en effet ; il s'agit de l'épargne des Français. D'ailleurs, je réponds par avance à Pascal Savoldelli, cette proposition de loi vise l'épargne de tous les Français : l'encours de l'assurance vie s'élève à 1 856 milliards d'euros, pour 18 millions d'assurés et 38 millions de bénéficiaires, avec un encours moyen de 44 000 euros en 2018 ; l'encours moyen de l'épargne retraite s'élève, lui, à 12 000 euros.
Christine Lavarde, sans aucun doute, nous ne nous sommes pas faits que des amis parmi les assureurs, car ils ne sont pas favorables à la transférabilité externe des contrats. Cela dit, nous n'avons pas eu d'éléments qui nous ont vraiment convaincus sur le risque de déstabilisation que cette transférabilité représenterait.
Vincent Segouin a rappelé que la transférabilité existe pour les PER, elle existe partout ailleurs. Simplement, chose étrange, l'assurance vie est le seul investissement pour lequel on est pieds et poings liés. Plusieurs d'entre vous ont évoqué la finance verte. Il y a dix ou douze ans, ces produits n'existaient pas et, même si l'on veut orienter aujourd'hui son épargne vers l'assurance verte, on ne peut pas changer d'assureur. Ce n'est pas normal que l'on perde l'avantage fiscal quand on change de compagnie. Cet obstacle à la transférabilité externe est une incongruité, donc les assureurs devront s'adapter, sans que le marché en soit d'ailleurs bouleversé, puisqu'il faudra attendre huit ans ; c'est dans l'intérêt des épargnants.
Marc Laménie demandait qui régule ce marché. Il y a deux acteurs : l'ACPR, qui contrôle les banques et les assurances, et l'AMF pour les produits d'investissements et financiers. Quant aux intermédiaires immatriculés auprès de l'Orias et qui commercialisent les produits, ils étaient au nombre de 71 300 fin 2021.
C'est vrai, la présentation des profils d'investisseur est décourageante ; cela procède de plusieurs exigences européennes, qui obligent à préciser si le client est un investisseur averti ou non, etc. C'est pénible pour les épargnants, je le reconnais, et cela devient illisible. En revanche, Monsieur Nougein, il n'est pas obligatoire d'investir en unités de compte. Les fonds euros sont privilégiés par les épargnants et, pendant longtemps, la performance du marché monétaire étant très faible, les assurances devaient doper leur performance avec leurs réserves, ce qui leur coûtait cher. Ils avaient alors intérêt à proposer des unités de compte, mais l'investisseur a toujours le choix.
Monsieur Canévet, effectivement, sans transférabilité des contrats, l'épargne ancienne ne peut pas vraiment s'orienter vers la finance verte. Permettre les transferts de contrats peut donc favoriser de tels produits.
Vanina Paoli-Gagin a soulevé la question des frais imposés sur les comptes des défunts ; je partage la philosophie de sa proposition, mais il faudra retravailler l'amendement, pour la séance publique.
Monsieur Savoldelli, j'ai répondu sur l'épargne ciblée. Je ne sais pas ce qu'est l'investissement durable, mais je sais en revanche que les fonds américains sont très intéressés par l'épargne française, qui est abondante. Il faudra donc que nos acteurs nationaux et européens se réveillent, sinon ils seront dépassés par les acteurs américains et les fintechs. Ils doivent offrir un panel plus large de produits et autoriser la transférabilité. Sans cela, les acteurs américains prendront le marché français. Dans cette perspective, nous proposons d'encadrer les frais de transfert et d'imposer un délai effectif de deux mois pour la transférabilité interne de l'assurance vie.
Christian Bilhac a souligné l'importance de l'information ; notre philosophie est en effet de rendre celle-ci lisible. On souhaite connaître non sa plus-value potentielle et le détail des frais, mais le montant total de ces derniers et la performance nette. En revanche, madame Vermeillet, le contenu des documents à fournir est d'ordre réglementaire, on ne peut pas aller jusqu'à déterminer le contenu des documents ; cela figurera dans un arrêté.
C'est vrai, monsieur Féraud, notre proposition de loi fait suite à des travaux sénatoriaux portant sur les frais bancaires, les contrats d'assurance vie, les contrats bancaires en déshérence, les questionnaires de santé pour les assurances emprunteur, l'interdiction des publicités pour des placements exotiques, etc. Bref, notre commission est très soucieuse de protéger l'épargnant et ce texte y participe.
Par ailleurs, je ne tiens pas forcément à insérer des dispositions fiscales dans cette proposition de loi. Il serait en effet prématuré de rehausser le dispositif Madelin alors que nous attendons une évaluation pour le mois de septembre 2023.
Je le reconnais, l'article 8 n'est pas nécessairement au coeur du sujet, je ne fais pas de lien entre cette proposition de loi et les retraites, nous verrons avec mon co-rapporteur, le sujet pourrait aussi être traité en loi de finances. Je suis pour ma part ouvert sur cette question, d'autant que l'enjeu est minime, il s'élève à 13 millions d'euros.
Madame Vermeillet, nous voulons un comparateur aussi transparent que possible et diffusé sur internet, avec l'ensemble des frais.
Vincent Segouin a évoqué le risque systémique de la transférabilité ; on nous avait dit aussi que la transférabilité de l'assurance emprunteur entraînerait l'effondrement du marché. Cela ne s'est pas produit. Là encore, les acteurs s'adapteront ; d'ailleurs, ils récupéreront aussi des contrats entrants ! Le risque n'a en tout cas pas été chiffré. Du reste, c'est vrai, la transférabilité existe effectivement sur le PER.
Monsieur Bazin, nos chiffres sont fondés sur des simulations s'appuyant sur les données de l'Autorité européenne des marchés financiers. Par ailleurs, vous avez raison, on nous oppose le code de déontologie, mais l'appât du gain existe aussi. Ce n'est pas forcément dans l'intérêt des épargnants de renouveler leur portefeuille mais cela peut être dans l'intérêt des gestionnaires, en raison des commissions de mouvement qui s'appliquent. Ces commissions sont d'ailleurs une exception française que les acteurs eux-mêmes ont eu du mal à défendre. Leur interdiction pure et simple s'impose donc.
Monsieur Breuiller, sur le financement participatif, nos dispositions sont la transposition de ce que l'ACPR demande déjà aux acteurs du financement participatif couverts par des obligations déclaratives au titre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Nous ne voulons nullement alourdir le processus. Simplement, nous voulons une harmonisation et éviter les « trous dans la raquette ».