Intervention de Roland Ries

Réunion du 21 février 2007 à 15h00
Création d'un observatoire des pratiques du commerce international et de la mondialisation — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Roland RiesRoland Ries :

Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, cette question orale est l'occasion pour nous de débattre d'un problème fondamental, je veux parler de la mondialisation et de ses effets sur notre économie et nos emplois.

S'il y a, à l'évidence, beaucoup à dire sur le sujet, je me contenterai de traiter de l'opportunité de la création d'un observatoire des pratiques du commerce international et de la mondialisation, objet d'une proposition de loi de notre collègue M. Virapoullé et de cette question orale avec débat.

Lorsque j'ai pris connaissance de cette proposition de loi, mon impression initiale a été qu'il s'agissait d'un texte de nature tout à fait consensuelle, ne soulevant pas a priori d'objections.

Il est vrai que la création d'un observatoire tendant à mesurer les effets de la mondialisation et des échanges internationaux sur notre économie nationale, notamment en termes de création ou de destruction d'emplois, n'est pas fondamentalement de nature à alimenter le clivage entre la gauche et la droite, d'autant moins que l'objet principal est apparemment de faire la lumière sur le dumping social, les contrefaçons, le travail illégal des enfants et des prisonniers, ainsi que sur l'incidence de la production industrielle sur l'environnement.

Cependant, je dois avouer que cet a priori positif a assez rapidement cédé la place à des doutes qui tiennent aussi bien à la question de la fonction réelle de cet observatoire qu'aux formulations contenues dans l'exposé des motifs de la proposition de loi.

En ce qui concerne l'exposé des motifs, permettez-moi de m'étonner que notre collègue Jean-Paul Virapoullé, ainsi que l'ensemble des signataires de ce texte, semblent découvrir aujourd'hui seulement des réalités économiques nationales et internationales que nous dénonçons, à gauche, depuis des années !

Visiblement, la théorie du libre-échange qui a inspiré le GATT à partir de 1974 et l'OMC à partir de 1995 est présentée dans cet exposé des motifs comme pernicieuse. Vous allez même, mon cher collègue, jusqu'à mettre en doute la théorie de Ricardo, qui sert de base conceptuelle à l'ensemble de cette logique libérale.

Vous le dites très clairement : l'idée que les pays à bas coûts salariaux se spécialiseraient tout naturellement vers des productions à faible valeur ajoutée, contribuant ainsi à l'équilibre global du système économique mondial, ne se vérifie pas ou ne se vérifie plus aujourd'hui.

Vous allez même jusqu'à affirmer que « cette compétition mondiale, de surcroît, compresse les salaires et donc la consommation intérieure, principale composante de la croissance ». On ne saurait mieux dire et j'approuve totalement ce point de vue !

Enfin, vous pointez du doigt les pratiques protectionnistes déguisées d'un grand nombre de pays qui, sous couvert d'ouverture de leurs marchés - vous avez notamment cité les États-Unis -, s'arrangent pour fausser la concurrence en recourant à toutes sortes de procédés, comme la sous-évaluation monétaire, les diverses formes de dumping, les contrefaçons, le travail illégal des enfants, voire la corruption à grande échelle.

En résumé, vous nous dites que le libre-échange pénalise économiquement les pays qui jouent loyalement ce jeu et favorise ceux qui transgressent les règles de la concurrence de diverses manières, mais, le plus souvent, de façon hypocrite et subreptice.

Je partage cette analyse, mon cher collègue, mais, en même temps, j'ai en mémoire un certain nombre de discours prononcés par vos amis politiques qui allaient dans un sens complètement différent. Je ne les citerai pas ici, mais je dois dire que votre point de vue ne me paraît pas communément partagé dans votre famille politique...

Je sais bien qu'aujourd'hui il est de bon ton de brouiller les repères, au point que tel candidat de droite à la présidence de la République en vient à citer Jaurès et Blum pour crédibiliser son programme électoral.

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