Intervention de Émilie Counil

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 12 janvier 2023 : 1ère réunion
Table ronde avec des chercheuses de l'institut national d'études démographiques ined

Émilie Counil, chercheuse associée à l'Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux (Iris), auteure de travaux de recherche sur les inégalités sociales de santé :

Je me permettrai de revenir sur les politiques publiques. Vos questions portaient spécifiquement sur les carrières des femmes et des hommes. Si nous revenons spécifiquement sur les questions de santé au travail, nous devons garder certains éléments à l'esprit. Bien sûr, les politiques de prévention sont essentielles. Il est nécessaire de genrer les approches et de tenir compte des différences entre les hommes et les femmes dans les dispositifs de traçabilité et les facteurs de pénibilité retenus. Il est également primordial de rappeler que la réparation des atteintes à la santé au travail a été pensée pour dédommager et indemniser les victimes, mais aussi pour inciter les employeurs à adopter des mesures de protection des travailleurs, obligation légale de sécurité et de résultat. À ce titre, nous voulons signaler que le système de réparation, bien qu'il soit relativement plus ouvert en France que dans d'autres pays d'Europe, reste encore très limité en termes d'accessibilité. Les problèmes de santé psychique ne sont notamment pas pris en compte. Nous avons pourtant vu qu'ils peuvent principalement toucher les femmes, bien que nous n'éludions pas ceux qui peuvent affecter les hommes, pour lesquels l'accès à la réparation en cas de maladie professionnelle est également difficile. Ces dimensions de genre doivent vraiment être intégrées, tout comme celles, plus larges, d'invisibilisation, de non-recours au droit et d'accès aux droits dans les dispositifs de réparation.

Enfin, au-delà des grandes enquêtes dans lesquelles nous intégrons un maximum de données sociodémographiques contextuelles, de manière à comprendre la construction des parcours de vie et de santé, nous avons besoin que la statistique publique inclue systématiquement le sexe - c'est déjà le cas -, la profession - ce n'est pas le cas de manière exploitable sur les certificats de décès -, la position sociale et l'histoire migratoire des personnes. Il est en effet important de tenir compte des mécanismes plus larges de division sociale et sexuelle du travail et des risques. Ce sujet a été documenté dans d'autres pays. La France ne fait pas exception, mais est à ce jour moins outillée pour le montrer.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion