Intervention de Tristan Mathieu

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 25 janvier 2023 à 9h35
Solutions d'adaptation et de résilience hydrique de notre pays — Audition de Mm. Olivier Thibault directeur de l'eau et de la biodiversité au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires thierry caquet directeur scientifique environnement de l'inrae et tristan mathieu directeur des affaires publiques du développement durable et de la rse de veolia eau france

Tristan Mathieu, directeur des affaires publiques, du développement durable et de la RSE (Veolia eau France) :

Je suis accompagné d'Anne du Crest, directrice des opérations de Véolia Eau France qui pourra vous donner des retours de terrain de ce que nous avons vécu cet été. Veolia France distribue l'eau pour un Français sur trois, emploie 15 000 salariés sur le territoire et gère plusieurs milliers d'usines de traitement d'eau.

Je partage le diagnostic et les solutions avancées par mes deux prédécesseurs. L'été 2022 a en effet été très difficile en matière de gestion de la ressource en eau et annonce les suivants. Selon les experts, d'ici une vingtaine d'années, les conditions de l'été 2022 seront les normales saisonnières d'un été sur trois en France. Pour renforcer la conscience du public, il faut sensibiliser les Français au fait que le territoire métropolitain évolue vers des températures et un climat semi-arides. Nos voisins européens, comme l'Espagne et dans une moindre mesure l'Italie, ont vécu cette situation quelques années avant nous.

Nous sommes bien face à une nouvelle donne. La prise de conscience des citoyens est en train de s'opérer. Il y a vingt ans, environ un tiers des Français craignait un manque d'eau dans sa région ; aujourd'hui ils sont deux tiers à le craindre. C'est une source de satisfaction pour Veolia de constater que le premier plan en matière de planification écologique concerne l'eau. Nous sommes impatients d'en découvrir les mesures. Notre conviction est qu'il faut réinvestir pour les services publics d'eau et d'assainissement, ce qui a insuffisamment été fait par le passé. Le critère d'alerte porte sur le taux de renouvellement des canalisations : 0,7 % des canalisations sont renouvelées chaque année, ce qui équivaut à une durée de vie théorique des canalisations de 150 ans... La réponse face à ce sous-investissement doit être ciblée. Olivier Thibault a raison de souligner qu'il s'agit de sujets locaux et temporels. La saisonnalité n'est pas assez prise en compte dans les lois. Ainsi, l'interdiction d'instaurer des tarifications dégressives pour l'eau ne dit rien de la temporalité : il y parfois trop d'eau et parfois pas assez.

Il faut aider les collectivités à investir. Il existe en effet une forme de tyrannie du prix de l'eau, qu'il faut réussir à dépasser. Ces évolutions doivent notamment reposer sur davantage de programmations publiques locales. Nous subissons aujourd'hui les effets du retrait des directions départementales de l'agriculture (DDA), des directions départementales de l'équipement (DDE) et plus généralement de l'ingénierie publique. Les collectivités sont moins accompagnées qu'auparavant dans la mise en oeuvre de leurs investissements.

Enfin, il faut développer la culture de la responsabilité. Face à une ressource limitée, chaque acteur qui prélève de l'eau doit être sensibilisé. Des engagements doivent être pris par le monde agricole pour mieux comptabiliser l'eau prélevée, pour faire évoluer les procédures de cultures, pour améliorer l'irrigation et pour renforcer la sobriété... Le monde industriel doit aussi être mis à contribution. Beaucoup d'acteurs économiques, notamment dans le domaine du golf, du kayak ou du tourisme, nous ont contactés après l'été en s'interrogeant sur la pérennité de leurs activités. Nous devons également limiter les pertes en eau. En France, 1 litre sur 5 d'eau potable n'est pas distribué à cause des fuites de canalisations. Ce n'est certes pas un mauvais rendement comparé à nos voisins européens. Mais nous pouvons faire beaucoup mieux ; dans certaines zones, des taux de fuites de l'ordre de 50 % sont constatés.

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