Selon le système d'information des services publics d'eau et d'assainissement (SISPEA), le prix de l'eau en France s'élève en moyenne à 4,30 euros le mètre cube. Je souligne que l'assainissement coûte aujourd'hui plus cher que l'eau potable. Par ailleurs, ce chiffre de 4,30 euros implique qu'un centime d'euro permet tout de même de disposer de 2,5 litres d'eau. Cela est à la fois cher quand il y a abondance d'eau et pas cher quand il n'y en a plus. Par comparaison, des annonces ont été faites à Bruxelles sur une deuxième augmentation en 2023 de 15 % du prix de l'eau, après une première augmentation de 15 % en 2022. Le prix de l'eau devrait s'établir dans la capitale belge à 6 voire 6,50 euros le mètre cube. Le niveau des prix est similaire en Allemagne. Comme l'a souligné Olivier Thibault, les adaptations nécessaires auront une incidence sur le prix de l'eau. Les efforts doivent être partagés et tout ne doit pas reposer sur le consommateur. La TVA sur l'assainissement est de 10 % tandis que celle sur l'eau potable est à 5,5 %. L'État pourrait avoir la bonne idée d'aligner ces taux à la baisse, ce qui permettrait d'alléger la facture et de dégager des capacités de financement pour les collectivités.
Dans les moments de tension, nous avons besoin de plus de solidarité avec les plus démunis et de plus d'efficacité. S'agissant des mesures de solidarité, nous n'avons pas d'avis sur le meilleur système entre la gratuité des premiers mètres cubes d'eau, les chèques eau ou encore la tarification sociale. Une chose est cependant certaine : ces deux dernières options sont très ciblées alors que la première ne l'est pas. La gratuité des premiers mètres cubes d'eau n'est pas une mesure sociale puisqu'elle n'est pas redistributive entre personnes aisées et moins aisées. Il est dur de déterminer ce que recouvre une consommation d'eau : une volumétrie équivalente peut correspondre à la consommation d'une famille nombreuse ou à un foyer constitué d'une seule personne qui gaspille la ressource. Il est donc nécessaire de bien cibler et d'aider les collectivités à le faire. La digitalisation des services publics et la mise en place des compteurs communicants peuvent permettre d'instaurer des tarifications saisonnières, afin d'envoyer un signal prix pour faire baisser la consommation dans les périodes de forte tension sur l'eau.
S'agissant de la réutilisation des eaux usées, je rejoins les propos d'Olivier Thibault, en ajoutant un bémol. Quand l'eau de la station d'épuration est rejetée en mer ou dans l'océan, nous avons tout intérêt à la retenir sur terre. C'est ce que Veolia eau fait à Bonifacio avec la réutilisation des eaux usées pour des activités de tourisme. Cela représente environ la consommation pour le mois d'août de la ville.
Ce n'est pas à Veolia de se prononcer sur l'opportunité d'une loi sur l'eau. Il est néanmoins certain que la politique de l'eau a été trop souvent conduite en silos. Il faut la « désiloter » en abordant à la fois l'agriculture, l'urbanisme, l'industrie...La simplification, que nous appelons aussi de nos voeux, devrait tout particulièrement concerner la réglementation sur les autorisations des eaux usées traitées. Les élus et les opérateurs tentant de mettre en oeuvre ces projets de réutilisation doivent faire face à cinq ou six administrations différentes (commission locale de l'eau, agence régionale de santé, conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques, services des préfectures...). Cette complexité fait que les projets mettent au moins 10 ans à se concrétiser. Une simplification qui me tient à coeur serait ainsi la création d'un guichet unique dans chaque département pour traiter les dossiers et apporter de l'expertise aux élus locaux.