Monsieur le président, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, le texte qui vous est présenté aujourd’hui vise – cela a été dit – à permettre la réalisation d’une liaison autoroutière entre les communes de Machilly et de Thonon-les-Bains dans le département de la Haute-Savoie.
Le Bas-Chablais et, plus largement, le département de la Haute-Savoie attendent depuis longtemps la réalisation de cette liaison ; il convient, en la matière, de se donner les moyens d’avancer.
Bien que reconnue d’utilité publique en 2019, la construction de cette liaison nouvelle est actuellement à l’arrêt, car les dispositions du plan local d’urbanisme intercommunal de la communauté de communes du Bas-Chablais adopté en février 2020 s’avèrent incompatibles avec le projet d’infrastructure.
Or – je serai bref, car cela a été bien expliqué – il semble que cette incompatibilité entre le PLUi du Bas-Chablais et le projet autoroutier ne résulte pas d’une décision délibérée des collectivités, mais plutôt d’une erreur de traduction, au sein du document d’urbanisme, d’un projet par ailleurs anticipé, longuement débattu et très attendu.
Il convient donc de corriger cette erreur. L’intervention législative proposée est évidemment exceptionnelle et a vocation à le rester, mais il est important qu’une solution concrète soit rapidement apportée.
Vous l’avez dit, madame la rapporteure, il serait juridiquement possible, en théorie, de faire évoluer le PLUi du Bas-Chablais par les procédures classiques, voire d’attendre qu’un nouveau PLUi soit élaboré par la collectivité.
Mais les délais qu’impliquent ces procédures seraient extrêmement longs, vu le nombre des étapes à franchir, s’agissant d’un projet pour lequel les garanties demandées se trouvent avoir déjà été apportées, toutes les procédures requises ayant été suivies.
Ce choix relève désormais, de manière exceptionnelle et spécifique, d’une décision parlementaire, donc démocratique, assortie en tant que telle de nouvelles garanties. Bien entendu, j’en laisse juge le Sénat, que M. Pellevat et Mme Berthet ont parfaitement éclairé.
J’entends par ailleurs les arguments d’opposants au projet – je me dois de les évoquer – qui, sur le terrain comme peut-être dans cet hémicycle, le refusent en tant que projet routier.
Vous le savez, je partage très clairement la volonté de réduire toujours davantage l’impact environnemental de nos infrastructures de transport et de décarboner au maximum et le plus rapidement possible nos mobilités. C’est ce à quoi je m’attache en prônant la mobilisation des crédits de soutien en faveur du réseau ferroviaire, du report modal et de la transformation de nos infrastructures, ainsi que le montreront les arbitrages qui seront soumis au Parlement dans le sillage de la remise prochaine du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures à Mme la Première ministre.
Toutefois, il faut aussi être clair, réaliste et pragmatique : tous les villages de France ne seront pas demain, en un clin d’œil, accessibles par le train ou par les mobilités douces.
L’usage de la voiture est évidemment complémentaire des modes de transport que je viens de citer ; il reste indispensable dans de nombreux territoires, tout particulièrement en zone rurale et de montagne.
Disons-le, si nous avons besoin de moins de transport routier, nous avons aussi besoin d’un transport routier adapté et plus durable : il faut davantage de transports partagés – covoiturage, autopartage, etc. – et d’électrification, à chaque fois que cela est possible – nous encourageons ces évolutions.
L’ennemi de l’environnement n’est pas la voiture en elle-même, ou la route en elle-même : c’est l’usage individuel et polluant des véhicules. C’est en ce domaine que nous devons agir et accélérer, sur ces transformations que nous devons travailler.
En outre, et c’est heureux, les standards environnementaux applicables à nos infrastructures les plus « traditionnelles », comme la route, vont en s’améliorant ; bien qu’une infrastructure sans impact n’existe pas, nous avons fait beaucoup de progrès, collectivement, en matière de traitement de l’eau ou de protection de la biodiversité.
À cet égard, j’y insiste, le projet en question répond à toutes les garanties environnementales en vigueur, légales comme réglementaires. Le Conseil d’État a d’ailleurs écarté, par une décision du 30 décembre 2021, l’ensemble des contentieux qui demeuraient pendants.
Rappelons enfin que la route qui existe aujourd’hui entre Machilly et Thonon souffre de congestion et n’offre pas les garanties de sécurité élémentaires et suffisantes, l’engorgement du trafic ainsi engendré posant non seulement un problème de sécurité, mais aussi un problème environnemental.
L’État soutient depuis l’origine ce projet de liaison autoroutière qui est très largement et très ardemment souhaité par les collectivités locales et par nombre de sénatrices et de sénateurs ; je tiens en particulier à saluer Cyril Pellevat et Sylviane Noël, ainsi que Loïc Hervé, lui aussi impliqué dans ce projet utile au développement du territoire et conforme à l’ensemble des exigences réglementaires.
Si le recours à la loi pour modifier un PLUi doit rester exceptionnel, il appartient au législateur et, en l’espèce, aux sénatrices et sénateurs aujourd’hui rassemblés, d’en apprécier l’opportunité – j’en ai, pour ma part, indiqué l’importance. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur cette proposition de loi.