Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, prenant le relais de mon collègue Albéric de Montgolfier, je veux également commencer par saluer la qualité de nos échanges avec le ministère et les autorités de supervision, ainsi que l’importance de nos travaux complémentaires sur cette proposition de loi. Nous avons entendu de nombreux acteurs, avec qui nous n’étions pas toujours en accord, même si nous poursuivions le même but : protéger davantage les épargnants.
Cet objectif est au cœur des chapitres II et III de la proposition de loi que je m’apprête à vous présenter.
Nous avons deux moyens d’agir sur les frais. Comme l’a souligné Albéric de Montgolfier, en évoquant l’article 1er, le premier consiste à interdire les frais qui nous paraissent inopportuns ou redondants. Le deuxième, indirect, mais aussi très efficace, consiste à garantir les conditions d’un choix éclairé pour les épargnants.
En assurant une transparence accrue sur la performance nette des produits, en tenant compte de tous les frais, les épargnants seront en mesure de choisir les produits les plus rentables et les mieux adaptés à leurs besoins. Quand nous parlons de ces informations, nous ne faisons pas référence à un document qui manquerait de lisibilité et que l’épargnant finirait, au mieux, par ranger dans un tiroir en rentrant chez lui. Au contraire, l’affichage du coût complet des produits doit conduire à entretenir et à stimuler la concurrence entre les acteurs et à exercer une pression à la baisse sur les frais.
L’article 3 impose tout d’abord aux distributeurs d’assurance vie et aux gestionnaires de plans d’épargne retraite (PER) de présenter, lors de la souscription d’un contrat ou d’un plan, les fonds indiciels cotés disponibles. Pourquoi ces produits en particulier ? Parce que ces fonds, le plus souvent en gestion passive, présentent un niveau de frais généralement inférieur aux fonds en gestion active, pour une performance nette en moyenne égale ou supérieure.
Or ces fonds ne sont quasiment jamais proposés à la souscription, trop peu rentables pour les distributeurs et les conseillers. Leur présentation pourrait donc entretenir une saine compétition et il est vraiment temps que les distributeurs se saisissent du sujet. À défaut, ils prennent le risque d’être dépassés par les nouveaux acteurs qui, eux, proposent des fonds indiciels cotés avec une souscription sur internet. Je ne suis pas sûr que ce soit vraiment mieux pour les épargnants et je préférerais que les distributeurs « traditionnels », qui ont la confiance des épargnants, s’emparent pleinement du sujet.
L’article 4 permet, quant à lui, de remédier à un obstacle que nous connaissons de longue date, à savoir l’impossibilité de disposer d’une information claire sur les frais totaux des produits financiers.
Désormais, l’ensemble des épargnants pourront accéder à une information lisible, publiée sur les sites internet des établissements. Par ailleurs, les informations communiquées aux contractants ne seront plus seulement basées sur la performance annuelle, mais sur la performance pluriannuelle des produits.
Dans le même temps, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), dans un format rappelant celui de l’Observatoire des tarifs bancaires, sera chargé de suivre les pratiques tarifaires de l’assurance vie et des plans d’épargne en actions (PEA), ouvrant la voie à une comparabilité objective des produits.
Je crois que M. le ministre partagera cet avis : cet article est capital. Il constitue une véritable avancée au service de la transparence et de la bonne information des épargnants. Les unités de compte seront classées par performance nette : c’est plus lisible pour chacun, à charge ensuite au conseiller de faire son travail pour constituer le panier de produits le plus approprié.
Comme l’ont souligné nos collègues en commission, peu de personnes peuvent comprendre ce que l’on veut dire par « valeur brute en cas de rachat » ou « plus-value potentielle ». Ce sont des informations plus concrètes dont ont besoin les épargnants.
Le chapitre III de la proposition de loi est consacré au développement et à l’adaptation des produits d’épargne. Nous pouvons ici distinguer deux types d’articles : ceux qui lèvent les contraintes pesant sur certains produits d’épargne et ceux qui tendent à encourager une véritable concurrence sur le marché de l’épargne.
Concernant les premiers, l’article 5 propose un « droit à l’erreur » sur le PEA, avec la possibilité pour l’épargnant de ne pas perdre l’avantage fiscal s’il corrige son erreur – je pense, par exemple, à l’achat de titres non éligibles au PEA. En complément, l’article 5 bis vise à assouplir légèrement le champ des titres éligibles au PEA pour favoriser l’accessibilité des produits de capital-risque, encore trop méconnus.
En ce qui concerne le développement du capital-investissement, la commission a, sur notre proposition, supprimé l’article 6 relatif au dispositif Madelin, dont nous avons eu l’occasion de débattre très récemment dans le cadre du dernier projet de loi de finances.
Preuve de notre bonne foi, monsieur le ministre, nous sommes prêts à attendre les résultats de l’évaluation de ce même dispositif avant de proposer de nouvelles mesures.
S’agissant de l’encouragement de la concurrence sur le marché de l’épargne, j’en viens à un sujet qui nous est particulièrement cher et qui ne manquera pas, j’en suis sûr, de susciter quelques débats : l’article 7 et la transférabilité des contrats d’assurance vie. Il comporte deux volets relatifs à la transférabilité interne, d’une part, et à la transférabilité externe, d’autre part.
Il s’agit d’abord de lever les obstacles au développement de la transférabilité interne, que l’assuré pourra demander à tout moment à l’assureur ou à l’intermédiaire, lequel sera tenu de réaliser le transfert dans les deux mois.
Après son examen en commission, cet article consacre désormais un droit au transfert interne, sans possibilité pour les assureurs de s’y opposer, tout en limitant les frais pouvant être imposés lors de cette opération.
Faire du transfert interne un droit vraiment opposable est un progrès indéniable. Les dispositions que nous proposons donneront pleine portée à ce que nous avions voté dans le cadre de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte.
D’ailleurs, déjà à ce moment-là, on nous prédisait que le transfert interne allait conduire à l’écroulement du marché de l’assurance vie et à une forte instabilité financière. Tout le monde s’y était opposé ; or nous voilà unanimes, trois ans plus tard, pour renforcer la portée de ce dispositif.