Quand M. Le Maire n’est pas là, on est obligé de parler à sa place ; je me permets donc de le citer : « Le déploiement du PER est un succès majeur ! Ce produit d’épargne retraite permet aux Français de disposer d’un produit d’épargne avantageux pour préparer leur retraite. » Quelle ironie !
Le succès est tel que l’encours de 70 milliards d’euros du nouveau PER créé par la loi Pacte provient pour 79 % des anciens produits des plans d’épargne retraite… La loi Pacte aura au moins eu le mérite de remplacer le plan d’épargne retraite « populaire » créé par François Fillon par un plan d’épargne individuel qui dit mieux son nom.
Le rapporteur général de la commission des finances et son prédécesseur, tous deux rapporteurs de ce texte, ont décidé de supprimer l’article 8 ; c’était également notre volonté. Pas de prolongation du double avantage fiscal sur la conversion des produits d’assurance vie en plan d’épargne retraite : vous évitez ainsi de mettre de l’huile sur le feu, mais tout de même…
Que tous ceux qui se mobilisent en ce moment même, partout en France, prennent le temps d’écouter un instant. Je me lance dans le conseil fiscal, en citant Mariem Karoui, ingénieure patrimoniale au cabinet Haussmann Patrimoine : « nous recommandons principalement le PER à des personnes imposées à 41 % ». Vous m’avez bien entendu : 41 %, c’est-à-dire la tranche d’imposition marginale de ceux qui ont près de 80 000 euros de revenu fiscal de référence – une paille !
Je reprends donc une question du média spécialisé O ption Finance pour vous la poser, mes chers collègues : « Même si elle se développe, l’épargne retraite restera-t-elle, en conséquence, un marché de niche, réservé à une petite minorité de la population, en mesure d’épargner fortement ? ». J’ai une petite idée de la réponse, vous l’aurez compris, mais vous me direz si je me trompe !
L’article 9 traduit la même finalité : favoriser les retraites par capitalisation, par l’entremise de la Caisse des dépôts et consignations. Or la retraite par capitalisation, c’est déjà le chacun pour soi, alors même que la solidarité intergénérationnelle doit être sanctuarisée, alors même que l’épargne la plus sûre et la plus juste est la socialisation des salaires par les cotisations sociales, alors même que, depuis 1990, les peurs alimentées – de manière effroyable ! – par des discours et des réformes alarmistes font croire aux travailleurs de ce pays qu’ils n’auront pas de retraites ! C’est pour cela qu’ils s’adonnent à des placements financiarisés dont ils ne connaissent pas les finalités sociales et écologiques.
Mes chers collègues, nous voterons près de la moitié des dispositions de ce texte, mais nous ne le voterons pas dans son ensemble, parce qu’il évacue le rendement social et écologique des 5 727 milliards d’euros d’épargne populaire qui ne sont nullement, à nos yeux, traités dans cette proposition de loi.