Quatre ans plus tard, j’attends toujours l’invitation… Heureusement, le Sénat a continué de travailler.
J’aborderai tout d’abord la transférabilité interne, au sein d’une même entreprise d’assurance vie, sorte de pis-aller qu’on nous avait accordé à l’issue de la commission mixte paritaire sur la loi Pacte.
J’ai bien entendu que le Gouvernement soutenait pleinement les démarches visant à conforter ce principe. Or les acteurs sont encore confrontés, au quotidien, à divers freins et difficultés.
En effet, les assureurs et les courtiers y sont toujours réticents et exploitent donc la moindre faille ou imprécision législative pour refuser d’accéder à la demande de leurs clients. Si les deux amendements adoptés en commission sur l’initiative des rapporteurs vont dans le bon sens, des précisions doivent encore être apportées – j’ai déposé deux amendements à cet effet.
J’ai surtout entendu le Gouvernement, par la voix du ministre Barrot, s’opposer à la transférabilité externe en s’appuyant sur deux arguments.
Selon vous, la transférabilité externe, par les sorties qu’elle entraîne, empêcherait le bon financement de l’économie. Permettez-moi de vous rappeler, monsieur le ministre, que les compagnies d’assurances sont obligées de respecter des ratios fixés par le code des assurances et par la directive européenne Solvency II.
Cette réglementation imposant la proportion d’actifs que doivent détenir les compagnies d’assurances, la transférabilité externe n’aura absolument aucune conséquence sur les ratios et ne limitera donc pas les investissements en actions.
Ensuite, monsieur le ministre, vous avez argué que la transférabilité externe, parce qu’elle déclencherait des sorties et des entrées, placerait les assureurs dans des conditions de marché parfois défavorables.
Je vous rappellerai simplement l’ordre de grandeur des mouvements déjà à l’œuvre : en 2021, les versements en assurance vie s’élevaient à 148, 6 milliards d’euros, pour 126, 2 milliards d’euros de rachats. Il s’agit bien là de mouvements emportant des conséquences sur la gestion de portefeuille des assureurs.
Selon France Assureurs, 657 000 contrats ont été transférés en 2020 et 2021, pour un montant de 21, 9 milliards d’euros. Au premier semestre 2022, le mouvement se poursuit : 128 000 transferts de contrats pour 4, 5 milliards d’euros. Tout cela doit bien évidemment être rapporté au volume d’encours de l’assurance vie, qui s’élève à 1 874 milliards d’euros.
Je précise que, dans le cadre de la transférabilité interne, les fonds du contrat A sont vendus et réinvestis dans le contrat B, fonds euro compris. Or je n’entends pas les assureurs se plaindre de ces problèmes de transférabilité ni de devoir gérer des mouvements de rachat pour leurs clients.
Pourquoi le Gouvernement craint-il tant la transférabilité externe, qui ne va pourtant pas entraîner du jour au lendemain des mouvements de déstabilisation considérables compte tenu de l’encours total ? Redoutez-vous que des compagnies d’assurances soient dans une difficulté telle qu’elles risquent d’être mises à mal par des clients apeurés ? Mais alors pourquoi devrait-on sauver ces compagnies d’assurances zombies ?