Intervention de Vanina Paoli-Gagin

Réunion du 31 janvier 2023 à 14h30
Protection des épargnants — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Vanina Paoli-GaginVanina Paoli-Gagin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 146 milliards d’euros, soit le montant de la surépargne des Français depuis le début de la crise sanitaire. Ce chiffre, relevé fin juillet dernier par la Banque de France, est supérieur au montant du plan de relance et à celui des mesures de soutien au pouvoir d’achat.

Le phénomène est désormais bien connu : les mesures de restriction sanitaire ont fait chuter la consommation, alors que les mesures de soutien au pouvoir d’achat ont préservé les revenus des ménages. En conséquence, l’épargne a explosé, atteignant des sommets sans précédent.

L’étude de la Banque de France, parue en septembre dernier, montre que le phénomène perdure malgré la levée des restrictions sanitaires. Cette surépargne « covid » nous rappelle que l’épargne constitue d’abord un moyen de se protéger, surtout quand des incertitudes assombrissent l’avenir. Mais ce qui a changé, depuis mars 2020, c’est que notre pays a renoué avec l’inflation, alors que la plupart des économistes pensaient que ce phénomène ne nous concernait plus.

L’inflation constitue désormais la principale menace pour l’épargne des Français, car elle l’enserre dans un étau : d’une part, comme les prix augmentent, la fraction de la consommation du revenu des ménages fait de même, ce qui diminue mécaniquement la fraction affectée à l’épargne ; d’autre part, la hausse des taux d’intérêt, qui accompagne l’inflation, ne suffit pas à compenser l’augmentation des prix. En témoigne le rehaussement de 3 % du taux du Livret A, bien en deçà de l’inflation. En conséquence, l’épargne des Français tend à s’éroder.

Je salue donc la proposition de loi présentée par nos collègues Albéric de Montgolfier et Jean-François Husson visant à protéger les épargnants. Ils ont engagé leurs travaux bien avant l’envolée de l’inflation, notamment au travers d’un rapport d’information publié en octobre 2021, dont la proposition de loi reprend les recommandations d’ordre législatif. Il ne s’agit pas d’un texte de circonstance, mais les circonstances le rendent plus pertinent encore.

La plupart des articles, y compris ceux – nombreux – qui ont été ajoutés en commission, peuvent sembler techniques, mais ils apportent des mesures bienvenues pour les épargnants.

C’est notamment le cas de l’article 7, qui garantit une réelle transférabilité des contrats d’assurance vie. Une telle mesure devrait rendre le marché plus concurrentiel et donc améliorer les prestations de gestion de ces produits. Elle donne également davantage de liberté aux épargnants en leur permettant de choisir l’option qui leur convient le mieux.

Lorsque nous avons ouvert la possibilité de résilier à tout moment les contrats d’assurance-crédit, les Français se sont emparés de cette nouvelle liberté. Ils font désormais jouer la concurrence à leur avantage ; ils feront de même avec les contrats d’assurance vie.

Dans le même esprit, je salue également l’assouplissement des critères d’éligibilité au PEA des quotas des fonds communs de placement à risque (FCPR). Cela favorise le financement en capital-risque, notamment pour les jeunes entreprises innovantes. Or toute mesure permettant de financer notre économie doit être encouragée, a fortiori par les temps qui courent.

Par ailleurs, cette proposition de loi comporte des mesures d’encadrement et de régulation visant à protéger les épargnants contre des pratiques qui pourraient les induire en erreur. Si elles sont bienvenues, certaines de ces mesures risquent de manquer d’efficacité, car les opérateurs, et notamment les banques, trouvent toujours des chemins détournés.

C’est un cycle bien connu s’agissant de la régulation bancaire : certaines pratiques soulèvent des indignations, le législateur légifère et les banques finissent par contourner ces interdictions, soulevant de nouvelles indignations… Je crains que la régulation des pratiques bancaires ne soit une tâche de Sisyphe : jamais achevée, toujours à recommencer.

Dans le registre des pratiques bancaires peu recommandables, il en est une qui a soulevé l’indignation du public, grâce à une récente publication de l’UFC-Que Choisir : le prélèvement de frais bancaires sur les comptes de défunts. Or, voilà près d’un an, j’avais déposé une proposition de loi sur cette même question. J’en reprendrai donc en partie les dispositions dans un amendement visant à encadrer strictement ces pratiques.

J’espère que le Sénat saura envoyer un message fort pour mettre un terme à ces pratiques qui ajoutent de l’indignation à la peine des familles et écornent la confiance des Français envers les institutions bancaires.

Vous l’aurez compris, notre groupe soutiendra cette proposition de loi, qui va dans le bon sens. Je vous engage également, mes chers collègues, à voter pour les amendements que nous défendrons.

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