Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pendant plus de trente ans, la hausse durable des prix, leur hausse généralisée, à la fois sur les biens et les services, a été contenue en France.
La rupture intervenue à l’été 2021 fut soudaine, avec des conséquences négatives sur le pouvoir d’achat des Françaises et des Français, sur le fonctionnement de nos services publics, de nos entreprises et de nos collectivités. Cette rupture fut violente, en particulier pour les plus modestes. De fait, le renchérissement du coût de la vie touche avant tout les produits alimentaires et l’énergie. Il touche aux fondamentaux de notre vie quotidienne. C’est, par conséquent, pour les responsables publics que nous sommes, une préoccupation majeure, d’où l’organisation de débats réguliers, dont celui de cet après-midi.
Les causes sont multiples et de natures différentes. Certaines sont d’ordre conjoncturel, quand d’autres sont plus structurelles. Elles produisent, en somme, un effet cocktail.
Cette inflation est la conséquence de la sortie de la crise pandémique, avec une demande qui a nettement pu augmenter, plus fortement que l’offre, restée fragile sur certains produits. Elle est la résultante de l’agression militaire russe en Ukraine, qui a occasionné une baisse des exportations et une montée des prix des matières premières. Elle est aussi alimentée par la baisse de l’euro, qui a renchéri le prix des importations. Les prix de l’énergie ont aussi été mis sous pression.
Au reste, l’explication ne réside pas que dans le contexte international. Elle réside aussi dans un fait durable : l’épuisement des sources d’énergies fossiles, couplé avec l’impérative transition écologique, qu’il nous faut nécessairement mener de front.
La rupture fut et demeure cependant moins appuyée en France qu’ailleurs.
Avec un taux à 6, 2 % sur un an, selon la dernière note de l’Insee, publiée hier, la France reste en dessous de la moyenne de la zone euro, et le pic inflationniste devrait être atteint cette année. Les explications sont à trouver dans les politiques mises en œuvre depuis maintenant plus d’un an. Contre l’inflation, l’État a agi, agit et agira encore. Nous soutenons toutes vos actions, madame la ministre.
En effet, afin de soutenir le pouvoir d’achat, de nombreuses mesures ont été adoptées, avec la revalorisation des minima sociaux, des prestations sociales et familiales, de même que des pensions de retraite de base.
Globalement, les dispositifs de soutien ont porté sur l’encadrement des prix de l’énergie : 12 millions de ménages – les plus modestes – ont été destinataires d’un chèque de 100 euros ou de 200 euros en décembre dernier. Un chèque exceptionnel a été attribué à ceux qui se chauffent au fioul ou principalement au bois.
L’action sur le travail a également été résolue : revalorisation du point d’indice des agents publics, « prime Macron » devenue « prime de partage de la valeur ». Ce dispositif pérenne, que les entreprises peuvent mettre en place chaque année, a bénéficié à 5, 5 millions de salariés en 2022, en augmentation de 50 % par rapport à 2021, et avant tout au sein des petites entreprises. La prime s’est élevée, en moyenne, à 739 euros, pour un total de 4, 4 milliards d’euros. Elle a contribué à préserver le pouvoir d’achat des ménages en 2022, en dépit de la hausse des prix, ainsi que l’Insee le rappelle également.
J’en profite pour saluer l’accord intersyndical validé par la CFE-CGC, la CFDT, FO et la CFTC. Son objectif est de généraliser largement des dispositifs tels que l’intéressement, la participation et la prime de partage de la valeur à toutes les entreprises de plus de 11 employés. Nous avançons sur ce point essentiel.
Je forme le vœu que nous continuions à avancer lors de l’examen du futur texte relatif au plein emploi. Je pense, enfin, aux projets de loi relatifs à l’énergie adoptés ou en cours de discussion au Parlement.
Je citais les derniers chiffres de l’Insee. Quel est le constat, dans le détail ? La baisse des coûts de l’énergie est de 14 % sur un an, contre 16, 3 % en janvier, mais la hausse persiste sur les prix de l’alimentation et des services. Alors que les négociations annuelles entre distributeurs et industrie agroalimentaire s’achèvent, les prix dans les rayons des supermarchés pourraient encore grimper.
Il est, par conséquent, nécessaire, madame la ministre, que ce domaine fasse l’objet d’une vigilance particulière afin de maîtriser ce que j’appellerai « l’inflation de l’assiette ». En visite au salon de l’agriculture, samedi, le Président de la République s’est exprimé à destination des pêcheurs, en donnant de la visibilité sur les aides, mais aussi sur la hausse des prix dans les supermarchés, en appelant les distributeurs à « faire un effort sur leurs marges ».
Il y a la détermination de nouvelles mesures, adaptées, ciblées, et puis il y a l’optimisation du recours aux dispositifs existants.
Par exemple, pour aider les Français modestes à faire face à la flambée des prix du carburant, le Gouvernement a mis en place une indemnité de 100 euros. Parce que plusieurs millions de conducteurs éligibles ne s’étaient pas encore manifestés, vous avez annoncé la prolongation du délai de demande jusqu’à la fin du mois de mars. Nous devons diffuser l’information sur les aides dans nos territoires respectifs.
Je veux conclure en soulignant la situation en outre-mer. Le ministre Jean-François Carenco a présenté, en décembre, un plan pour préserver le pouvoir d’achat des Ultramarins. Fruit d’intenses négociations, ce plan traitait essentiellement de l’élargissement des boucliers qualité-prix adaptés à chaque territoire. Où en est-on de cet « Oudinot du pouvoir d’achat », à la carte, alors que, au-delà de cette période inflationniste, la vie chère est un problème structurel en outre-mer ?