Intervention de Marie-Claude Varaillas

Réunion du 1er mars 2023 à 15h00
Lutte contre les violences pornographiques — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Marie-Claude VaraillasMarie-Claude Varaillas :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons une proposition de résolution importante qui appelle à faire de la lutte contre les violences pornographiques une priorité de politique publique. Un principe de réalité s’impose à nous, mes chers collègues : nous vivons dans une société où la pornographie est omniprésente et où les violences sexuelles sont malheureusement aussi très présentes.

Car oui, la pornographie contribue à la culture du viol et à la normalisation de la violence sexuelle. Les images violentes et dégradantes qui y sont représentées ont un impact réel sur la manière dont les hommes et les femmes se perçoivent eux-mêmes.

C’est pourquoi nous devons nous opposer fermement à une industrie opaque et mondialisée qui exploite et objective le corps des femmes et des minorités de genre. Nous devons comprendre que le porno est un produit culturel qui se nourrit des discriminations de genre dans notre société pour générer des milliards d’euros de profit.

En effet, l’excellent rapport de nos collègues met en relief que dans la pornographie, les femmes et les minorités de genre sont souvent reléguées à des rôles stéréotypés et dégradants, tandis que le mythe de la performance masculine est surreprésenté.

Il est grand temps de dénoncer cette représentation des sexes biaisée, qui renforce les inégalités existantes et nourrit la culture de la violence sexuelle.

En outre, nous ne manquerons pas de pointer du doigt une industrie sans aucun scrupule, dans laquelle les actrices pornographiques sont victimes d’exploitation, de harcèlement et de violences sexuelles.

De plus, par cette résolution, nous souhaitons dénoncer une industrie du porno qui a des répercussions néfastes sur la santé physique et mentale des acteurs et des spectateurs. D’une part, les actrices pornographiques sont exposées à des infections sexuellement transmissibles, à des troubles de stress post-traumatique, à des troubles de l’alimentation et à d’autres problèmes de santé mentale ; d’autre part, les spectateurs de porno peuvent développer des addictions, des troubles de la sexualité et des problèmes de santé mentale.

Mes chers collègues, il est impératif que nous prenions des mesures pour contrer les effets nocifs de la pornographie actuelle sur notre société. En particulier, comme l’a évoqué ma collègue Laurence Cohen, nous devons fournir des ressources pour éduquer le public aux dangers de la pornographie et aux moyens de résister à ses effets néfastes. Cela peut inclure des campagnes de sensibilisation ou encore des programmes éducatifs pour promouvoir une éducation sexuelle mettant en avant la diversité des identités de genre et des orientations sexuelles, qui respecte la dignité et l’autonomie de chacune et qui lutte contre les stéréotypes sexistes et homophobes. Ces mesures sont plus que nécessaires lorsque l’on sait qu’en France, deux tiers des moins de 15 ans – mes collègues l’ont dit précédemment – ont déjà visionné des images pornographiques et 2, 3 millions de jeunes de moins de 18 ans en visionneraient tous les mois.

Nous plaidons également en faveur de mesures pour lutter contre l’exploitation des actrices dans l’industrie pornographique. Il est grand temps de travailler à créer des espaces sûrs et égalitaires afin de protéger leur dignité et leur intégrité physique et mentale. Les violences systémiques qu’elles subissent doivent cesser.

Enfin, nous devons renforcer les lois et les politiques qui protègent les victimes de la violence sexuelle et de l’exploitation dans l’industrie pornographique.

En France, la justice commence à ouvrir les yeux. Avec l’affaire French Bukkake, pour la première fois en France, des acteurs ont été poursuivis pour viol dans des investigations visant l’industrie pornographique : nous voyons là un premier pas vers la reconnaissance du fait que les actrices pornographiques ne sont pas des citoyennes de seconde zone. Leurs plaintes à la police doivent être prises au sérieux. Il est nécessaire d’améliorer la formation des policiers pour recueillir de telles dénonciations.

En outre, le droit à l’oubli ne doit pas être à deux vitesses pour les actrices du porno. Faut-il donc rappeler que certaines ont dû débourser entre 3 000 euros et 5 000 euros pour faire retirer des vidéos en ligne dans lesquelles elles apparaissaient, en faisant valoir leur droit à l’oubli ? Cela n’est pas acceptable. Nous ne pouvons demeurer les bras croisés. À ce propos, madame la ministre, que comptez-vous faire des recommandations de ce rapport, qui méritent à l’évidence que nous agissions ?

Mes chers collègues, la violence sexuelle dans la pornographie est un problème de société qui nécessite des réponses collectives. En adoptant cette proposition de résolution, nous nous engageons en faveur de la lutte contre les violences pornographiques. Nous attendons que l’on érige celle-ci comme une priorité de politique publique, afin de mieux éduquer le public face aux dangers de ces violences et de protéger les actrices pornographiques, qui sont très souvent victimes de violences sexuelles. C’est une responsabilité que nous devons tous partager et un engagement que nous devons prendre.

C’est pourquoi le groupe CRCE, dont l’ensemble des élus sont signataires de la proposition de résolution, la votera bien évidemment.

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