Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 2 mars 2023 à 14h30
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 — Discussion générale suite

Olivier Dussopt :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, pardonnez-moi, mais je ne répondrai pas individuellement à chacun des intervenants, qui ont été nombreux. Je m’attarderai simplement sur quatre points, en écho aux différentes interventions.

Au préalable, je vous remercie de vos interventions, mesdames, messieurs les sénateurs, en préambule de l’examen du texte que nous entamons aujourd’hui.

Chacun a exprimé des oppositions, fait part de son soutien, apporté des nuances. Cela augure de débats qui nous permettront d’avancer sur un certain nombre de sujets.

Mon premier point porte sur l’objectif de la réforme que nous menons. Je l’ai dit, mais je le répète en réponse à de nombreuses interventions, nous voulons faire cette réforme pour ramener le système à l’équilibre, tout en l’améliorant.

Si nous nous contentions de l’améliorer, cela serait plus facile, mais cela ne serait pas très responsable. Si nous nous contentions de le ramener à l’équilibre par des mesures de nature purement budgétaire, sans mettre à profit cette occasion de débattre pour corriger des inégalités et créer un certain nombre de nouveaux droits, mieux prendre en compte la pénibilité, ou encore relever le montant des plus petites pensions – j’y reviendrai –, cela ne conviendrait pas non plus.

Nous devons faire cette réforme en gardant le cap de l’équilibre. Selon les prévisions, la réforme, telle que nous vous la proposons, rapportera 17, 7 milliards d’euros, grâce aux seules mesures d’âge.

Nous avons prévu d’augmenter légèrement le taux de cotisation à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; je sais votre assemblée attachée à ce que la loi garantisse la bonne compensation pour les employeurs concernés, hospitaliers et territoriaux. Nous pourrons avancer sur ce sujet.

Nous avons aussi proposé, pour rester dans les bornes du système de retraite, que le taux de cotisation AT-MP des employeurs puisse être légèrement réduit, la branche AT-MP étant excédentaire à hauteur d’environ 20 % de ses recettes globales. A contrario, nous proposons d’augmenter légèrement le taux de cotisation des employeurs à la Cnav afin de générer un milliard d’euros supplémentaires, dans le cadre du système de retraite. C’est ainsi que nous disposerons d’environ 19, 5 milliards d’euros supplémentaires en 2030.

Cette somme nous permettra de financer les mesures nouvelles et les mesures d’accompagnement, mais aussi de résorber le déséquilibre attendu, que les prévisions évaluent à 13, 5 milliards d’euros en 2030.

Pour être tout à fait complet, je veux rappeler qu’un certain nombre de mesures annoncées ou envisagées auront des effets budgétaires.

Je pense, pour les mesures envisagées, à un amendement qui tient beaucoup à cœur à M. le rapporteur sur la retraite anticipée pour les salariés en incapacité permanente, mais je ne vais pas engager un débat budgétaire dès à présent sur ce sujet, Gabriel Attal étant déjà intervenu sur cette question.

Je pense, pour les mesures annoncées par le Gouvernement, au financement du fonds de prévention de l’usure professionnelle, dont les dépenses relèvent non pas du système de retraite, mais de la branche AT-MP. Nous savons la capacité de celle-ci à faire face tant à la modulation des taux qu’aux dépenses supplémentaires que nous proposons de lui faire prendre en charge.

L’ensemble de ces dispositions permettront au système de retraite de revenir à l’équilibre, mais nous devons être particulièrement vigilants afin que les différentes mesures qui seraient adoptées ne viennent pas contrarier cet objectif. Il serait extrêmement dommageable de mener une réforme sans en tirer le bénéfice d’un retour à l’équilibre et, partant, d’une pérennisation du système.

Mon deuxième point porte sur les amendements qui ont été déposés.

Certains d’entre eux – c’est normal dans un débat parlementaire – ont pour seul objet de remettre en cause l’essence même de la réforme. Le Gouvernement ne pourra évidemment pas leur être favorable.

D’autres, en revanche, déposés par la quasi-totalité des groupes, nous permettront d’avancer, d’apporter des précisions, de créer des droits. Le Gouvernement, tout en faisant preuve de la prudence financière que je viens d’évoquer, sera ouvert à l’ensemble de ces propositions. Je tiens à le souligner, car ce texte, tel qu’il résultera des travaux du Sénat, tel qu’il sera voté, je l’espère, par la Haute Assemblée, sera ensuite discuté en commission mixte paritaire. Chaque fois que nous pourrons améliorer le texte pour parvenir à des consensus, faciliter les convergences et, peut-être, gommer une partie des différences ou des oppositions qui s’expriment, nous aurons tout à y gagner.

Je souhaite ensuite – c’est mon troisième point – souligner la complexité du sujet, qui a été rappelée dans chacune de vos interventions.

Notre système de retraite est extrêmement complexe, parce qu’il est morcelé en 42 régimes et qu’il présente des inégalités, parfois des injustices, en tout cas des différences entre les règles qui s’appliquent dans chacun d’entre eux.

Lorsque j’ai évoqué, dans mon propos liminaire, le chantier des droits familiaux, j’ai mentionné la question des pensions de réversion. Imaginez-vous que, dans notre système de retraite actuel, il y a treize règles différentes en la matière ! Avec la même situation professionnelle, les mêmes revenus et une situation familiale identique, on peut être éligible à une pension de réversion dans un système de réversion et ne pas l’être dans un autre, car les conditions de revenus sont différentes d’un système à l’autre. Voilà l’une des injustices, des inégalités sur lesquelles nous devrons travailler d’ici au PLFSS pour 2024.

Cette complexité se reflète dans les territoires d’outre-mer, que vous venez d’évoquer, madame la sénatrice Jasmin. Vous avez rappelé que l’âge effectif de départ à la retraite des assurés dans ces territoires est supérieur au nouvel âge d’ouverture des droits, que nous souhaitons fixer à 64 ans. À la Guadeloupe comme à la Martinique, l’âge effectif de départ est déjà supérieur à 64 ans.

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