Intervention de Patrick Titiun

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 1er février 2023 à 8h30
Audition de M. Patrick Titiun candidat proposée par le président de la république aux fonctions de membre du conseil supérieur de la magistrature

Patrick Titiun, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature :

Monsieur Bas, le CSM prend déjà position sur des sujets d'intérêt général concernant la justice, au travers de ses communiqués. Cela étant, il s'exprime de manière extrêmement prudente et n'intervient pas à tout moment.

À mon sens, le CSM doit avant tout s'exprimer dans un forum de dialogue. Il a pour mission de se rendre dans les juridictions, cours et tribunaux ; il connaît les territoires et le fonctionnement de la justice sur le terrain. Des échanges avec lui pourraient avoir un très grand intérêt, notamment au sein des commissions des lois, par exemple lors de la publication de son rapport annuel d'activité. Quant à la pratique actuelle du CSM, à savoir les prises de position ponctuelles lorsque les intérêts de la justice l'exigent, elle me semble satisfaisante et devra être poursuivie.

Monsieur Sueur, le statut du parquet fait depuis longtemps débat. Cela étant, lorsque la CEDH a condamné la France, c'était principalement en raison du rôle du parquet dans les procédures pénales : la CEDH a estimé que, si le parquet était indépendant, il n'était pas impartial, puisqu'il était une partie poursuivante. Or c'est le rôle du parquet de poursuivre les infractions pénales. Si la réforme que vous évoquez intervient un jour, ce rôle de poursuivant subsistera. En tout état de cause, la personne arrêtée et placée en garde à vue devra être présentée devant un juge indépendant et impartial.

Monsieur Richard, notre statut de la magistrature est protecteur ; la France n'a pas à en rougir. Les améliorations sont toujours possibles : il revient au constituant d'y procéder. La composition du CSM donne aujourd'hui toutes les garanties. Peut-être pourrait-on lui donner le pouvoir d'émettre un avis conforme sur les nominations des magistrats du parquet. Je sais que telle est la pratique - les avis non conformes sont d'ailleurs assez rares. Néanmoins, l'on mettrait ainsi le droit en accord avec elle : ce serait une amélioration.

Monsieur Leconte, l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme présente des avantages et des inconvénients. Elle a au moins deux avantages : donner au justiciable une meilleure compréhension des différents systèmes européens et soumettre à la CEDH les décisions prises par les institutions de l'Union européenne lorsqu'elles sont en contradiction avec les droits de l'homme. Toutefois, il faut prendre le temps de vérifier les modalités de mise en oeuvre d'une telle adhésion, notamment pour les questions de sécurité. Il s'agit bel et bien d'un sujet délicat - le projet d'adhésion est d'ailleurs discuté depuis près de quarante ans. Les négociations exigeront beaucoup de prudence, d'autant que le champ géographique du Conseil de l'Europe ne correspond pas à celui de l'Union européenne.

Monsieur le président, la magistrature entre effectivement dans une grande phase de recrutement. Pour ma part, je suis résolument favorable aux recrutements latéraux : ils permettront d'ouvrir la magistrature en faisant appel à de nouveaux talents - avocats, maîtres de conférences ou encore professeurs d'université. On déplore fréquemment la pénurie de civilistes : je suis convaincu que les avocats et les maîtres de conférences permettront d'y remédier. La magistrature se voit parfois reprocher son entre soi : il faut ouvrir ses portes à tous ceux qui veulent apporter leur concours à l'oeuvre de justice.

En tout état de cause, la question de la formation est essentielle. En recrutant plus largement, cela ne signifie pas que l'on ne formera pas. L'École nationale de la magistrature sera confrontée à un défi : former les magistrats qui passent par le premier ou le second concours, mais aussi tous ceux qui arriveront par des voies latérales. La formation, notamment à la déontologie, doit rester absolument cruciale pour les recrutements qui interviendront au cours des cinq prochaines années.

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