Mesdames et messieurs, merci de votre invitation à cette table ronde. J'avais préparé un document mais l'intervention du représentant de la DGAC en a évoqué la plupart des éléments. Je me contenterai donc de répondre aux points évoqués, notamment sur le rôle d'Air Austral dans la desserte de La Réunion et de Mayotte.
La compagnie Air Austral a été créée en 1990 à l'initiative du docteur Pierre Lagourgue, puis reprise par le président Paul Vergès. Précédemment dénommée Réunion Air Service puis Air Réunion, elle avait pour unique activité la desserte La Réunion-Mayotte dans le cadre d'une obligation de service public. Air Austral était donc la première compagnie à effectuer cette desserte. En 1990, nous avons eu la possibilité de desservir la ligne La Réunion-Paris, aux côtés d'autres opérateurs tels qu'Air France. Néanmoins, la desserte de Mayotte est toujours restée importante pour Air Austral, même après la cessation de l'obligation de service public à la fin des années 1990. Même après cette date, nous avons considéré qu'il était de notre obligation morale, en tant que compagnie aérienne de l'océan Indien, d'assurer la desserte de Mayotte.
En 2016, nous avons consenti un investissement important pour la desserte directe de Mayotte vers Paris, avec l'acquisition d'un Boeing 787-800.
Un élément n'a pas été suffisamment précisé par le représentant de l'aviation civile concernant la desserte de Mayotte. Il faut savoir que l'infrastructure au départ de Mayotte est contraignante pour les compagnies aériennes. En 1990, la piste mesurait 1 500 mètres, ce qui limitait le type d'avion susceptible d'y atterrir. Il n'était donc pas possible d'augmenter les fréquences. Cette situation n'a pas empêché pour autant le développement de la desserte entre Mayotte et La Réunion et entre Mayotte et Paris. Aujourd'hui, la piste mesure 1 900 mètres, ce qui limite encore le type d'appareils.
Les lignes La Réunion-Mayotte et Mayotte-Paris sont soumises au règlement européen permettant à toutes les compagnies basées en Europe de desservir ces lignes. En revanche, la contrainte liée à l'infrastructure aboutit à limiter le nombre d'opérateurs. De plus, le prix du carburant à Mayotte est le double du prix du carburant de La Réunion et de Paris. De ce fait, il est difficile pour une compagnie aérienne d'avoir un niveau de coût du carburant aussi élevé. Cet élément important explique pourquoi au départ de Mayotte, le prix est différent de celui au départ de La Réunion pour Paris. Cette différence est aussi marquée par les quatre opérateurs présents à La Réunion, qui permet d'offrir des tarifs d'appel lorsque la demande est faible.
La desserte directe Mayotte-Paris ne peut être effectuée qu'avec un seul type d'appareil, exploité avec toute sa performance sur une piste de 1 900 mètres. Air Austral a décidé d'augmenter le nombre de fréquences entre Mayotte et Paris à compter de janvier 2023. Ainsi, alors que le programme de vol modulait le nombre de fréquences en fonction de la demande de voyages, soit 6 à 7 fréquences en période de pointe et 3 à 4 fréquences en période creuse, le programme passera à une fréquence quotidienne sur Mayotte-Paris, ce qui permettra d'augmenter le volume de capacités offertes et de répondre à la demande.
Concernant La Réunion-Mayotte, trois opérateurs sont présents : Air Austral, Corsair et Ewa Air. Il n'y a pas de volonté de la part d'Air Austral de gérer la desserte entre Mayotte et La Réunion car la compagnie Ewa Air a sa propre politique commerciale et tarifaire. Par exemple, il existe une offre d'Ewa Air pour un aller-retour La Réunion-Mayotte à 129 euros alors que les tarifs d'Air Austral sont quelque peu supérieurs. Il existe donc une réelle concurrence entre ces deux opérateurs, même si la compagnie Ewa Air est contrôlée à 52 % par Air Austral.
Quant à l'évolution souhaitée par madame la présidente, c'est un point à envisager entre les actionnaires. Je laisserai donc madame la présidente se rapprocher de la Société d'économie mixte de transports aériens (SEMATRA) pour discuter des conditions dans lesquelles cette évolution pourrait intervenir. En tant que gestionnaire de la compagnie Air Austral, je réitère l'assurance que nous n'avons pas d'intervention sur la politique tarifaire d'Ewa Air, qui est libre de fixer son programme et ses tarifs entre La Réunion et Mayotte.
Concernant la continuité territoriale, nous n'avons pas, en tant que, compagnie aérienne, à intervenir dans ce domaine. Il est vrai cependant que c'est un sujet important car le déplacement des biens et des services entre Mayotte et La Réunion et l'Hexagone doit être géré par l'État. Les compagnies aériennes, ayant une activité commerciale, ne pourront pas aller au-delà de ce que les coûts leur permettront. C'est pourquoi si ces coûts sont trop élevés pour la population, il appartiendra à la puissance publique de prendre le relais et de favoriser les déplacements entre ces départements et l'Hexagone.