Je commencerai mon propos par souligner que, pour Corsair, il est parfaitement clair que les territoires ultramarins, en l'espèce La Réunion et Mayotte, ont des besoins spécifiques pour le transport aérien. Pour ces territoires, le transport aérien n'est pas un luxe ni un loisir, c'est clairement un bien de première nécessité. C'est pourquoi nous travaillons avec les antennes locales de LADOM dans le cadre de la continuité territoriale.
Notre rôle en tant que transporteur aérien est d'assurer la qualité des liaisons entre ces territoires et l'Hexagone. Nous nous attachons par conséquent à améliorer, année après année, la qualité de la desserte. Il y a quelques années, notre flotte était encore composée de Boeing 747. Nous dépassions alors peu souvent le vol quotidien vers La Réunion. En outre, nous étions empêchés d'opérer sur Mayotte.
Pendant la crise du Covid, nous avons renouvelé notre flotte en acquérant des Airbus A330, qui nous permettent à la fois d'offrir une meilleure qualité de produits, puisqu'il s'agit d'A330 NEO exclusivement, qui opèrent vers La Réunion et Mayotte. De plus, ces appareils favorisent l'augmentation des fréquences. De ce fait, les dessertes de La Réunion sont a minima en vols quotidiens et peuvent monter jusqu'à 12 fréquences par semaine au départ de Paris, sans compter les deux fréquences par semaine au départ de Lyon et Marseille vers La Réunion. Pour certains d'entre eux, ces vols poursuivent vers Mayotte trois fois par semaine toute l'année et quatre fois en période de pointe durant l'été, afin d'assurer un vol La Réunion-Mayotte-La Réunion. L'objectif est de commercialiser les flux entre l'Hexagone et Mayotte mais également d'assurer les liaisons entre La Réunion et Mayotte.
Comme cela a été souligné, nous sommes contraints par les infrastructures à Mayotte, et opérons exclusivement via La Réunion. Nous souhaiterions pouvoir opérer en direct, mais notre type d'appareil ne permet pas les liaisons directes Mayotte-Paris, la piste étant trop courte. C'est plus une contrainte qu'un choix.
Par ailleurs, il a été fait état d'une forme d'entente entre Air Austral et Corsair. Je m'inscris en faux contre cette assertion. Bien évidemment, il n'existe aucune entente mais des discussions pour des accords commerciaux qui n'ont pas été mis en oeuvre. En revanche, la desserte de Mayotte a été suspendue pendant trois mois de décembre 2021 à avril 2022, ce qui a conduit Corsair à affréter plusieurs compagnies pour assurer la liaison entre La Réunion et Mayotte. Cette situation était uniquement due à des contraintes purement opérationnelles de Corsair. C'est pourquoi nous avons affrété pour commencer Ewa Air, puis une compagnie européenne qui a assuré des liaisons pour notre compagnie pendant près de deux mois, avant de conclure un accord opérationnel avec Air Austral. Par conséquent, il ne faudrait pas interpréter cette suspension temporaire comme une entente et une manière de ne pas se faire concurrence car tel n'est absolument pas le cas. La concurrence vers Mayotte et La Réunion existe et a eu pour conséquence de faire baisser les prix dans le temps pour nos clients, tant à La Réunion qu'à Mayotte.
En d'autres termes grâce à l'arrivée de Corsair à Mayotte, les prix sur la liaison La Réunion-Mayotte et depuis Paris ont baissé par rapport à la situation précédente. Tel est également le cas pour La Réunion sur une période longue depuis vingt ans, et même sur une période courte. Aujourd'hui, les prix d'appel sont inférieurs à ceux de 2013 à 2015, époque où le carburant était déjà élevé avant de baisser dans les années 2016-2017, ce qui a coïncidé avec une baisse des prix.
Corsair s'attache à développer la qualité de la connectivité entre l'Hexagone et ces territoires. La concurrence est réelle. Pour autant, nous devons faire face à un contexte d'augmentation des coûts. Pour une compagnie long courrier avant la hausse, le carburant représente environ 30 % des dépenses totales. Or le prix du carburant a doublé en dollars depuis l'an dernier, ce qui a occasionné une hausse de 30 % des prix en raison du seul effet fuel. À cela s'ajoute l'effet dollar, qui s'est apprécié par rapport à l'euro à un niveau historiquement fort. Sachant que les coûts d'une compagnie aérienne en dollars pèsent jusqu'à 60 % des coûts totaux et que l'ensemble des prix des pièces et matières premières augmentent, il nous faut répercuter cette augmentation.
De plus, comme l'a dit fort justement Normane Omarjee, les compagnies aériennes ont de faibles marges, quand elles en ont ! Nous nous attachons donc à les restaurer depuis la crise de la Covid, mais l'équilibre reste fragile. Nous nous trouvons donc dans l'obligation de répercuter la hausse des coûts, sachant que les tarifs actuels ne sont pas plus élevés que ceux pratiqués il y a quelques années, à un niveau comparable de prix du carburant. Finalement, on ne retrouve pas dans les prix aériens actuels une inflation des prix connus sur l'ensemble des biens de consommation.
Nous sommes bien conscients du fort besoin de continuité territoriale. Nous travaillons donc avec les antennes de LADOM pour appliquer les bons de réduction prévus par les dispositifs. Le changement de mode de soutien de la région Réunion coïncide malheureusement avec l'augmentation de coûts et des prix, ce qui induit un « effet de ciseau » sur les résidents de La Réunion et de Mayotte. Néanmoins, la mise en place d'un système de prix fixe ne nous paraît pas tenable économiquement. Une compagnie aérienne ne saurait se substituer aux pouvoirs publics pour assurer des mécanismes de continuité territoriale.
Nous nous attachons à développer la qualité du produit et des liaisons. Nous en voyons les effets bénéfiques en termes de prix et de développement de l'offre, qui est plus importante qu'avant la crise dans le sens Paris-La Réunion (+ 8% en 2022). La problématique du soutien reste entière, mais la modération des prix ne peut être le fait des compagnies aériennes.