Intervention de Marie-Anne Barbat-Layani

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 1er mars 2023 à 9h30
Innovation et régulation dans le domaine des crypto-actifs — Audition de mmes marie-anne barbat-layani présidente de l'autorité des marchés financiers faustine fleuret présidente de l'association pour le développement des actifs numériques et de Mm. Nicolas Louvet président-directeur général de coinhouse et bertrand peyret secrétaire général adjoint de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution

Marie-Anne Barbat-Layani, présidente de l'Autorité des marchés financiers :

Plusieurs questions ont concerné la protection des épargnants, ainsi que les liens entre les produits financiers traditionnels et les crypto-actifs. Rappelons, premièrement, que les crypto-actifs ne peuvent être placés dans des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). Ils peuvent être placés dans des fonds destinés aux professionnels, mais à hauteur de 10 % seulement. Un certain nombre de protections ont donc été mises en place pour éviter la « fuite » du monde des crypto-actifs vers le monde financier traditionnel, et ceci tant que le monde des crypto-actifs ne sera pas soumis à un mode de régulation, ce qui sera bientôt le cas en Europe. Nous n'avons pas affaire à un univers totalement harmonisé à l'échelle mondiale, même si d'autres pays ont mis en place des réglementations sur les cryptomonnaies. C'est le cas notamment du Japon et je crois que les États-Unis s'y acheminent à grande vitesse, à la suite des événements liés à FTX.

Deuxièmement, il existe, au sein du règlement européen MiCa, une obligation d'informer les épargnants sur la consommation d'énergie des mécanismes de minage. Il ne s'agit certes pas d'un mécanisme de plafonnement, mais d'information, l'objectif étant de faire confiance aux épargnants et à leur sensibilité sur le sujet. Nous constatons par ailleurs à l'AMF que la finance durable correspond à une demande croissante des épargnants, et je ne doute donc pas que si ceux-ci venaient à constater l'existence de mécanismes très préjudiciables à l'environnement, ils en tireraient un certain nombre de conséquences.

Enfin, en ce qui concerne les obligations d'information des clients, le dispositif d'enregistrement simple ne prévoit aucun mécanisme de protection des épargnants. Seules certaines dispositions générales stipulent que la communication professionnelle doit être précise et loyale et ne doit pas constituer une pratique commerciale trompeuse. Il s'agit en réalité des dispositions générales du code de la consommation, qui s'avèrent dans les faits plus difficiles à appliquer dans un domaine proche du secteur financier. C'est pourquoi le dispositif d'enregistrement renforcé, puis d'agrément, inclura un certain nombre d'éléments qui contribueront à renforcer la protection des épargnants.

En conclusion, je lance un plaidoyer pour ce type de régulation. Cette régulation va bien au-delà de l'enregistrement, puisque l'on s'achemine à la fois vers des obligations en matière de gestion des conflits d'intérêts, de contrôle interne et de mise en place de procédures de traitement des réclamations. On commence à se rapprocher d'un univers de protection des épargnants, qui certes n'est pas équivalent à celui du domaine financier traditionnel, par exemple pour l'obligation de conseil, mais dans lequel un certain nombre de garde-fous sont instaurés, et qui concernent également le service de conservation dans le cadre de l'obligation de ségrégation des actifs numériques.

C'est pour cette raison que, comme l'ACPR, nous avons été favorables à la mise en place la plus rapide possible du dispositif d'agrément qui, faut-il le rappeler, est le seul qui existe dans le règlement européen. Il faut donc se mettre en situation de passer à ce régime d'agrément - nous y travaillons avec les acteurs -, même si celui-ne ne permettra pas d'offrir exactement le même niveau de protection des épargnants que celui qui prévaut pour un certain nombre de produits financiers traditionnels.

Il faut donc continuer à communiquer clairement vis-à-vis des épargnants sur les risques et sur la volatilité de ces actifs, bien que ces derniers ne soient pas les seuls à être volatils, les actions représentant également un actif financier risqué. L'enjeu de l'éducation financière consiste donc à plaider pour la diversification. Ces actifs comportent des risques importants et ne bénéficient pas des mêmes protections que les actifs financiers traditionnels. C'est pourquoi, s'il n'est pas interdit aux épargnants d'investir dans ce type d'actifs, il faut qu'ils le fassent en connaissance de cause.

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