Madame la ministre, comme certains l’ont déjà dit ici avec force, les moyens ne sont pas en réalité à la hauteur de l’objectif que vous avez rappelé tout à l'heure, à savoir assurer à toutes et à tous un égal accès aux services de santé, quels que soient le lieu de résidence et les revenus de chacun.
L’objectif réel et unique de ce projet de loi est bien la maîtrise des dépenses de santé. Nous assistons ainsi à un très fort mouvement de centralisation – certains ont même parlé d’une « étatisation » de la santé –, qui met en place les conditions du démantèlement du service public hospitalier, avec la mise en concurrence de ce dernier.
Permettez-moi, mes chers collègues, d’insister sur un point. Ce projet de loi met en danger non pas seulement le fondement solidariste de notre système de santé, mais également le principe constitutionnel de l’organisation décentralisée et des compétences transférées. Il témoigne en réalité d’une méfiance, voire d’une véritable défiance, à l’égard des élus locaux. J’en veux pour preuve le refus d’adjoindre le terme « autonomie » à la dénomination des agences régionales de santé et celui d’associer pleinement les conseils généraux à l’élaboration des schémas régionaux.
Concernant le champ des compétences, la clarté et la simplification revendiquée par les promoteurs de cette réforme restent un vœu pieu, puisque la compétence générale conférée aux ARS contredit directement le rôle de chef de file des départements en matière sociale et médico-sociale.
À défaut de prévoir une décision conjointe, l’articulation des schémas départementaux et régionaux d’organisation sociale et médico-sociale et des PRIAC, les programmes interdépartementaux d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie, risque évidemment d’entraîner des incohérences. Ainsi, les logiques mêmes qui les inspirent – ascendante pour la première, descendante pour la seconde – vont peut-être se contredire.
Concernant les pouvoirs de décision, les élus locaux, pourtant investis de la légitimité d’arrêter les choix politiques, sont écartés de tout lieu de décision et cantonnés au rôle de donneur d’avis, qu’il s’agisse de la gouvernance des établissements publics de santé ou de celle des ARS. La démocratie sanitaire n’y trouve donc pas son compte !
S’agissant enfin de la mise en œuvre des politiques sociales et médico-sociales, comment ne pas craindre la remise en cause des dynamiques et des synergies positives déjà difficilement mises en place, à l’heure où les financements des réseaux sont d’ores et déjà figés ?
Dans ces conditions, vous comprendrez, madame la ministre, mes chers collègues, que nous nous opposions à ce projet de loi.