Intervention de Claude Biwer

Réunion du 7 septembre 2006 à 10h00
Eau et milieux aquatiques — Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Claude BiwerClaude Biwer :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà un plus d'un an le Sénat adoptait en première lecture le projet de loi sur l'eau après l'avoir considérablement modifié. Compte tenu de l'importance du sujet, je regrette que celui-ci n'ait été débattu qu'il y a peu de temps à l'Assemblée nationale et qu'il nous arrive maintenant en session extraordinaire. Au demeurant, nous essaierons d'y apporter notre contribution au mieux des intérêts de tous.

Madame la ministre, nos concitoyens sont de plus en plus sensibles à l'évolution du prix de l'eau, qui, nous le savons tous, commence à peser lourd dans le budget des ménages.

Il est vrai que, depuis de longues années, les collectivités territoriales se voient dans l'obligation d'appliquer de nouvelles dispositions et réglementations relatives à la qualité de l'eau. Cela les oblige à réaliser des travaux pharaoniques, dont le coût se retrouve tout naturellement sur les factures d'eau. Les mesures de solidarité envers les plus démunis, que vous avez évoquées voilà un instant, madame la ministre, constituent un élément à prendre en compte dans les budgets. De ce côté-là, il y a peut-être quelques abus ; certains peuvent saisir des opportunités... Cela pèse très lourd dans les budgets, souvent petits, des communes rurales et crée des difficultés devant lesquelles les élus demeurent impuissants.

Au surplus, j'observe que l'application des normes de plus en plus strictes conduit les maires à confier la gestion des services des eaux et de l'assainissement aux sociétés délégataires de service public, ce qui, de mon point de vue, est souvent préjudiciable aux administrés, surtout en matière financière.

Le texte que nous examinons contient un certain nombre de dispositions qui ne vont certainement pas aller dans le sens d'une diminution des factures d'eau ! Je pense, par exemple, à la multiplication des redevances mises en recouvrement par les agences de l'eau, à qui, madame la ministre, vous avez l'intention de donner davantage de pouvoirs. J'ai compté pas moins de sept types de redevances, ce qui n'est pas toujours facile ni pour les agences ni pour les élus. Je souhaite que ce texte soit l'occasion d'aller vers plus de simplification administrative.

S'agissant du financement des travaux que doivent réaliser les collectivités territoriales en vue du renforcement des réseaux d'eau ou d'assainissement, je souhaite formuler quelques observations.

En premier lieu, je me permets de regretter à nouveau que le Gouvernement ait cru devoir - vous l'avez confirmé tout à l'heure - procéder à la suppression du FNDAE, qui apportait un concours financier non négligeable aux communes rurales pour le financement des travaux et qui - je pense que M. le rapporteur ne me contredira pas - permettait aussi aux départements, par le biais des transferts de moyens, de jouer un peu le rôle de levier dans l'action qu'ils menaient, en tout cas un grand nombre d'entre eux, au profit des collectivités qui en avaient besoin.

Certes, vous l'avez aussi annoncé, les agences de l'eau devront, pendant la période considérée, consacrer un peu plus de un milliard d'euros à la « solidarité » envers les communes rurales, du fait de la suppression de ce FNDAE. Mais, rapporté aux 12 milliards ou 14 milliards d'euros du plafond de leurs dépenses, ce milliard représente finalement assez peu, sauf s'il s'agit d'un « plus » pour les communes rurales par rapport au budget qui, je n'en doute pas, leur est imparti dans les agences. Peut-être alors verrions-nous les choses autrement.

Compte tenu des immenses besoins des communes rurales dans ces domaines, je proposerai un amendement visant à relever quelque peu ce niveau, car l'incertitude qui règne sur la manière dont ce milliard sera transféré m'inquiète un peu. Au reste, monsieur le rapporteur, je crois savoir que la commission ne s'est pas montrée très sympathique envers certains amendements que j'aurai l'occasion de défendre.

Par ailleurs, je suis étonné que, parmi les modes de financement mis en oeuvre par certaines agences de l'eau exerçant une action forte envers les collectivités qui en ont besoin figure encore le versement « d'avances remboursables » aux collectivités territoriales. Non seulement ces avances ne peuvent pas être considérées comme acquises tant que la décision n'est pas prise, mais en plus les délais de mise en oeuvre rendent quelquefois difficile la réalisation des travaux. Des budgets sont donc ponctionnés par les premiers remboursements, alors que les collectivités n'y sont vraiment pour rien. C'est la raison pour laquelle je souhaite vivement que l'on en revienne, de manière claire, à des aides sous forme de subventions, les plus précises possible, afin que les budgets ne supportent pas des à-coups auxquels nous ne souhaitons pas faire face.

De plus, permettez-moi de vous le dire, cette sorte de tutelle - c'est ainsi que je la qualifie - pesante et tatillonne que font quelquefois peser les agences de l'eau sur les collectivités et leurs élus n'est guère appréciée par ces derniers.

À cet égard, je propose de supprimer la disposition suivant laquelle les concours financiers que les agences de l'eau apportent aux collectivités territoriales ou à leurs groupements ne seraient définitivement acquis que sous réserve du respect des prescriptions relatives à l'eau imposées par la réglementation en vigueur. En effet, les investissements que réalisent les collectivités en matière d'adduction d'eau potable ou d'assainissement ont nécessairement pour objectif une mise en conformité avec les nouvelles normes en vigueur et sont, au surplus, réalisés sous le contrôle des agences de l'eau et des services administratifs.

Le Sénat, toujours soucieux des contraintes financières qui pèsent sur les collectivités territoriales, avait introduit un article additionnel visant à permettre aux conseils généraux qui le souhaitent de créer un fonds départemental. Je regrette que ce ne soit pas, semble-t-il, la voie qui ait été choisie.

L'Assemblée nationale a cru devoir supprimer cette possibilité par crainte qu'elle ne fasse double emploi avec les attributions des agences de l'eau. Je pense que les relations qui existaient entre les uns et les autres - et qui continuent d'exister - étaient telles que ce risque aurait pu être écarté. Je considère pour ma part que ces fonds départementaux ne feraient nullement double emploi avec les actions des agences de l'eau.

Nous aurions tort de nous priver de cet instrument de financement supplémentaire d'autant qu'il s'agit d'une possibilité offerte aux conseils généraux et non d'une obligation.

Je voudrais enfin vous faire part du profond mécontentement des maires de mon département à l'égard de la fréquence - et donc du coût - des opérations de contrôle sanitaire des eaux qui leur sont imposées. Ce problème constitue un sujet de discussion récurrent lors des assemblées générales de l'association des maires de mon département, association que j'ai l'honneur de présider.

Comme souvent, l'autorité administrative qui impose la fréquence et le contenu des prélèvements et des analyses de contrôle n'est pas celle qui les paie, puisque les laboratoires agréés les facturent aux collectivités territoriales.

Ce principe est d'ailleurs rappelé à l'article 24 quinquies qui a été inséré dans le présent texte par nos collègues députés. Mais celui-ci rappelle également que le contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine relève de la compétence de l'État.

Dans ces conditions, si l'on appliquait le principe « qui commande paie », vous devinez, madame la ministre, à qui j'adresserais volontiers la facture.

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