L'amendement n° 168 rectifié est important parce qu'il concerne le patrimoine et le devenir du canal d'Orléans. À ce titre, permettez-moi de vous rappeler, mes chers collègues, quelques éléments d'histoire et quelques chiffres.
Le canal d'Orléans, construit au XVIIe siècle par le duc d'Orléans, a été en très grande partie déclassé du domaine public fluvial de l'État en 1954, voilà cinquante-deux ans. Depuis cette date, il a été délaissé par l'État, qui n'a plus investi pour l'entretenir. Ce canal, comme tous les canaux, comprend des voies d'eau, des chemins de halage, des écluses, des terrains, des bâtiments et des étangs pour le réseau hydraulique.
En 1985, devant la dégradation du canal, l'État a fait appel au département, lequel a obtenu une concession de cinquante ans. Vingt ans plus tard, la concession a encore trente ans devant elle. Les deux cinquièmes de son existence se sont écoulés. Par ailleurs, 15 millions d'euros ont été investis à ce jour pour entretenir le territoire de ce canal, en particulier les maisons éclusières.
Un programme de 80 millions d'euros a été mis en oeuvre pour continuer de remettre en état le canal d'Orléans, en le rendant navigable.
D'ici à dix ans, nous aurons donc investi à peu près 100 millions d'euros dans ce cadeau de l'État donné en concession au département. Il est important de noter cette somme !
Nous demandons par conséquent que la propriété de la section du canal d'Orléans restée dans le domaine privé de l'État, car oubliée lorsqu'elle a été déclassée, soit transférée au conseil général du Loiret pour un euro symbolique, comme cela a été fait pour les autres canaux. En effet, sans le déclassement intervenu, elle serait restée dans le domaine public fluvial, aurait été entretenue et aurait pu être transférée pour l'euro symbolique. Mais l'appartenance au domaine privé de l'État ne permettant pas un transfert à titre gratuit, on propose de nous vendre cette partie du canal pour laquelle nous avons investi afin de remettre en état ce patrimoine, ce qui pose un certain nombre de problèmes.
Une cession pour l'euro symbolique serait d'autant plus morale que nous allons remettre en état cette section du canal, à la satisfaction de tout le monde et surtout pour éviter son démantèlement, puisqu'il s'agit de patrimoine national.
Tels sont la question et l'objet de cet amendement. L'actif réalisable par le propriétaire dans trente ans se compte sur les doigts d'une main : quelques millions d'euros, alors que le passif, ce que nous investissons, est d'environ 100 millions d'euros. Faites la balance ! Bien évidemment, nous hésitons à mettre quelques millions d'euros pour racheter quelque chose qui va nous coûter cher ! C'est le premier point.
Le second point, qui est hors amendement, mérite néanmoins quelques explications : il s'agit de l'aspect hydraulique. Un canal n'a d'intérêt et nous n'investirons que si de l'eau y circule - c'est quand même le but d'un canal ! - et, si l'on « route » les quarante écluses, qu'au moins il soit possible de faire des éclusées ! Nous devons trouver avec l'État une solution pérenne, et non remise en cause perpétuellement, pour faire fonctionner ce canal.
Actuellement, nous faisons une étude hydraulique extrêmement complexe. Nous avons besoin du soutien de l'État - un soutien pas forcément financier, mais technique - pour nous aider à avancer et pour valider à la fin du processus les solutions préconisées dans cette étude que nous souhaitons mener conjointement.
Sans ces deux points, le premier qui fait l'objet de l'amendement et le second, sous-jacent, qui concerne l'hydraulique et l'eau, laquelle est bien l'objet du projet de loi que nous examinons, nous ne parviendrons pas à faire fonctionner ce canal.
Très peu de gens d'ailleurs s'intéressent à la reprise des canaux, car tout le monde sait ce que cela coûte. Mais, pour nous, il s'agit d'un investissement touristique et économique. Dans un département voisin, l'État est en train d'abandonner financièrement un canal dont il est propriétaire. Les collectivités se retirent financièrement également. Cela va être une catastrophe écologique ! Le poids de la collectivité est en effet important pour sauver le patrimoine et en matière écologique et environnementale.
Tel est l'objet de cet amendement, dont la présentation a peut-être été un peu longue, mais, encore une fois, c'est important pour le patrimoine national.