Intervention de Bernard Doroszczuk

Commission des affaires économiques — Réunion du 8 mars 2023 à 9h30
Audition de Mm. Bernard Doroszczuk président et olivier gupta directeur général de l'autorité de sûreté nucléaire asn

Bernard Doroszczuk, président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) :

Ce n'est peut-être pas le bon exemple, mais c'est dans la règle. Revenons à présent sur le phénomène de corrosion sous contrainte. Comme vous l'avez souligné, il y a eu un élément nouveau ces dernières semaines, à savoir la découverte d'une fissuration de corrosion sous contrainte, sur l'un des circuits du réacteur de Penly 1, qui affiche une taille très importante. La fissuration fait 23 millimètres, pour une épaisseur totale de 27 millimètres, ce qui signifie qu'il reste 4 millimètres d'épaisseur. Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, la corrosion sous contrainte est un sujet sérieux. Il ne s'agit pas de microfissures. Quand il ne reste que 4 millimètres sur une épaisseur de 27 millimètres, cela pose problème. Qu'est-ce qui s'est passé jusqu'à présent ? J'ai eu l'occasion de le présenter aux membres de l'Opecst. Ce phénomène est effectivement apparu sur un certain nombre de réacteurs. Un travail très responsable et très engagé de la part d'EDF a alors permis en quelques mois de disposer de suffisamment d'expertise pour comprendre et expliquer le phénomène qui se produisait et prioriser les actions sur le parc nucléaire. Cela a été fait au premier semestre 2022, et la raison fondamentale pour laquelle il n'y a pas de débat entre les experts - même s'il y a toujours des raisons périphériques - c'est que la géométrie des lignes a conduit à développer un phénomène de corrosion sous contrainte. Cette géométrie des lignes se retrouve sur les réacteurs les plus récents. Ce n'est pas un phénomène de vieillissement. Les réacteurs les plus récents, qui ont vingt ans, sont plus affectés que les réacteurs de 900 mégawatts (MW), qui sont les plus anciens, parce que la géométrie des lignes n'est pas la même sur les réacteurs de 900 MW. Certains s'étonnent que l'on trouve ces fissures en France mais pas aux États-Unis. C'est normal. Les réacteurs existants aux États-Unis sont de conception identique à nos réacteurs de 900 MW, c'est-à-dire ceux sur lesquels, en France, nous n'avons pas trouvé de corrosion sous contrainte. Ce n'est pas une question de plus grande sévérité ou de techniques de contrôle particulières. Une fissuration de 3 millimètres reste tout de même assez sérieuse. Jusqu'à présent, nous mettions en avant cette explication, qui justifiait la stratégie de priorisation d'EDF sur 16 réacteurs par rapport à l'ensemble du parc de 56 réacteurs, 5 réacteurs N4 (les plus récents) et 12 réacteurs P'4. Le phénomène qui a été détecté est différent. Il concerne une soudure qui a été doublement réparée et dont l'alignement des tuyauteries, avant de réaliser la soudure, a été forcé. Sur site, le montage d'une tuyauterie se fait de proche en proche, avant de réaliser la soudure finale. En cas d'écarts d'ajustement, les éléments ne se retrouvent pas face à face à la fin. Il y a eu une approche qui n'est pas acceptable, qui a consisté à forcer les tuyauteries pour les aligner, avant de les souder. Des défauts sur cette soudure ont conduit à réaliser une deuxième réparation. C'est donc un point singulier, pas une explication générique mettant en cause la géométrie des réacteurs. Ce n'est pas pour autant que ce défaut ne peut pas apparaître ailleurs. Nous avons demandé à EDF d'identifier rapidement les cas semblables qui pourraient exister sur les autres réacteurs du parc nucléaire, pour pouvoir contrôler ces soudures. Nous allons réaliser un traitement spécifique. Nous avons exercé une grande pression sur EDF en ce sens, pour qu'ils définissent une évolution de la stratégie du contrôle. Cela ne supprime pas la stratégie initiale, qui est liée à un sujet générique, la géométrie des lignes, mais cela rajoute un point particulier, quand des réparations de cette nature ont été faites.

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